Masculin Féminin

1

Notre génération a connu une identité sexuée biologique « masculin-féminin » aujourd’hui bouleversée par le droit, les biotechnologies et les récentes études du genre. Cette identité serait-elle devenue un fardeau ? Devons-nous aller vers l’indifférenciation, conserver cette identité ou bien la faire évoluer ? Quelles valeurs souhaitons-nous transmettre à nos enfants et petits-enfants ?

Valeurs féminines et valeurs masculines. Si les hommes et les femmes sont égaux, tout au moins sur le plan des principes en Occident, nous ne sommes pas identiques. Il existe en chacun de nous des valeurs dites du féminin (la vulnérabilité, l’écoute, l’empathie, l’émotion ou la passivité) et celles du masculin (la force, la domination, l’intransigeance, la compétition). Valérie Colin-Simard, coach-thérapheute, Masculin Féminin, la grande réconciliation (Éd. Albin Michel, 2013), nous propose de les écouter tout simplement afin de les concilier et donc de les réconcilier :

©Valérie Colin-Simard « Cette question de la puissance du féminin, je l’ai rencontrée dans mon propre parcours. Elle s’est posée à ma mère et à ma grand-mère avant moi. Ma grand-mère était non seulement licenciée ès-sciences, mais aussi l’assistante de Marie Curie. Lorsqu’elle s’est mariée, mon grand-père l’a obligée à s’arrêter de travailler. À l’inverse, c’est ma mère qui pourvoyait à nos besoins, car mon père avait eu un accident cérébral. Elle m’a élevée dans l’idée qu’il fallait être indépendante financièrement, réussir professionnellement, serrer les dents. Elle était passée du côté des hommes, et je me souviens qu’elle regardait avec la plus grande condescendance ses amies femmes au foyer. Elle m’a ainsi transmis son mépris de ce qui, en moi, ressemblait de près ou de loin à une femme.

Dans un premier temps, j’ai suivi le même chemin. Aujourd’hui, dans mon cabinet, je suis sidérée de voir le nombre de femmes qui, même brillantes professionnellement, s’accordent peu de valeur. Comme moi autrefois, elles ont intériorisé les seules valeurs masculines de performance, de rationalité, de rentabilité, d’efficacité… et trouvent dévalorisantes celles que l’on associe au féminin. Par exemple, elles se coupent de ce qu’elles ressentent. Pour beaucoup d’entre elles, seul compte l’intellect. Des mots comme douceur ou vulnérabilité sont presque devenus des insultes. »

La réconciliation. Mépriser en soi les valeurs du féminin incarnées par son corps conduit bien souvent à un manque d’estime de soi. De même qu’un homme peut être vulnérable, une femme peut être forte. Si nous nions notre force, nous pouvons devenir une victime. De même que si nous nions notre vulnérabilité, nous pouvons basculer dans la toute puissance. Nous sommes à la fois puissants et vulnérables, homme et femme. Notre force naît de cette cohabitation. Les femmes qui ont pu mettre en avant leurs valeurs masculines pour faire carrière doivent oser le féminin. De même que celles qui taisent leurs valeurs masculines doivent les mettre en avant et oser. La puissance des valeurs féminines que nous possédons alliées aux valeurs masculines améliore notre bien-être et nous réconcilie avec nous-mêmes. Pour faire la paix à l’extérieur, il faut d’abord faire la paix à l’intérieur de soi-même !

Existe-t-il véritablement des principes ou des élans spécifiquement féminins ou masculins ? Simone de Beauvoir disait : « On ne naît pas femme, on le devient ». Judith Butler, auteur américaine du livre Trouble dans le genre (Éd. La Découverte, 1990), affirme que le sexe est une donnée déjà «cuite » et jamais « crue » et que le genre est un rôle construit socialement qui peut évoluer au cours d’une vie… Donc pour elle, pas de définition biologique ou naturaliste des identités (théorie queer).

Comment permettre à nos enfants de se construire une identité solide ? Certains médecins s’inquiètent aujourd’hui de la déconstruction actuelle du masculin/féminin. Stéphane Clerget, pédopsychiatre, affirme que même si nous sommes tous porteurs d’a priori qui vont influencer la manière de penser des enfants, les différences anatomiques influent bien sur la psychologie. Pour lui, éduqués par des femmes, à la maison comme à l’école, les petits garçons décrochent et il est urgent de réintroduire les hommes à l’Education nationale et de généraliser la garde alternée en cas de divorce. Pour le Dr. Sax, psychologue américain, fournir une éducation identique dans sa forme aux garçons et aux filles ne permet pas l’égalité et nier les différences entre les sexes n’a permis ni aux garçons de devenir infirmiers, ni aux filles de devenir ingénieures. Peggy Sastre, journaliste scientifique, affirme que les corps étant différents, les maladies le sont aussi et soutient l’importance d’une médecine différenciée. Enfin, le Professeur Jean-François Bouvet, biologiste, écrit que la question n’est plus tant de savoir si les cerveaux masculin et féminin diffèrent, car ils diffèrent ! mais de savoir à quel degré…

Et si nous revenions tout simplement à une égalité entre les sexes sans abus ? Et si nous revoyions tout simplement ce qu’est une femme et ce qu’est un homme en admettant nos différences et en nous permettant de réconcilier en nous les valeurs du féminin et celles du masculin ?

Marie-Hélène Cossé

LIRE:
– Dr. Stéphane Clerget, psychiatre pour enfants, Nos garçons en danger, école, santé, maturité, pourquoi c’est plus compliqué pour eux et comment les aider ? (Éd. Flammarion, 2015)
– Dr. Leonard Sax, psychologue américain, Pourquoi les garçons perdent pied et les filles se mettent en danger ? (Éd. JC Lattes, 2014)
– Peggy Sastre, journaliste scientifique, Le sexe des maladies, l’impact méconnu des différences hommes/femmes sur votre santé, comment en tirer profit ? (Éd. Guide Favre, 2014)
– Pr. Jean-François Bouvet, biologiste, Le camion et la poupée, l’homme et la femme ont-ils un cerveau différent (Éd. Flammarion, 2012)

L'article vous a plu ? Partagez le :

Les commentaires sont fermés.