Plongée dans nos placards

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Échantillons de parfums, boutons dépareillés, savonnettes d’hôtel, tout peut servir… mais ne servira jamais ! L’occasion de faire une descente dans nos armoires, sans corde de rappel, pour garder ou jeter le superflu. Pourquoi avoir peur du vide et est-ce si difficile de dire « bon débarras » ?

Le syndrome de Diogène

Cette addiction est une forme extrême d’accumulation compulsive, appelée pour les plus gravement atteints, syllogomanie (du grec « rassemblement ») qui est le fait d’accumuler de manière excessive des objets, indépendamment de leur utilité ou de leur valeur. Que trouvera-t-on chez vous après votre mort ? Les baguettes de vos commandes de sushis, les rubans des cadeaux de Noël ou les guides périmés pour des voyages rêvés, sans parler des cintres du pressing ou la carte grise de votre première automobile, avec pour constat « Ça peut toujours servir » ! Le plus grave, c’est qu’au lieu de trier et de jeter lors d’un déménagement, vous emballez et trimballez vos trésors pour les ranger dans une nouvelle armoire. Sans pour autant vouloir rivaliser avec l’écureuil qui amasse pour l’hiver, nous avons tendance à acheter deux anneaux de plus pour la tringle à rideau, deux boutons de plus pour le blazer de Monsieur ou deux tasses de plus en cas de perte ou de casse.

La tentation de l’objet gratuit

L’échantillon offert par la parfumeuse comme le « deux au prix d’un » pour le café soluble a des attraits irrésistibles auxquels on ne saurait résister. Appelés produits d’accueil dans les hôtels, les charlottes ou les kits de couture font notre bonheur. Entasser pour économiser ou parce que cela vous revient (vous avez payé votre chambre d’hôtel, votre note au restaurant ou votre billet d’avion…). Résultat, vous arpentez les vide-greniers pour vous débarrasser du trop-plein, fréquentez les brocantes et êtes abonnées aux sites de ventes gratuits. Et en même temps, quelle fierté d’exhiber devant vos amis, une porcelaine du 19ème ou la collection de verres à moutarde ! Les OTNI (objets traînants non identifiés) contribuent à la quête du statut social. Et les souvenirs de voyage consommables mais rarement consommés, le limoncello italien, le rhum martiniquais ou la retsina grecque remplissent votre frigo. Ce qui rentre dans notre maison n’en ressort pas !

La nature a horreur du vide, les armoires aussi

Les objets sont les mémoires de notre vie au même titre que les albums de photos hier ou les souvenirs de famille, un présent, un héritage, une transmission, voire un cadeau d’entreprise, on ne sait jamais ! Mais plus on garde de choses utiles et plus elles deviennent inutiles. Entasser entrave notre liberté et que vous donniez quatre ou dix jouets à un enfant, les études ont démontré qu’ils jouaient de la même manière mais que ceux qui en avaient moins étaient plus créatifs et plus concentrés. À bas donc le zapping par accumulation ! L’entassement est chronophage. Ranger et faire rentrer beaucoup dans un espace réduit prend du temps. Demain le vide sera chic, il l’est déjà chez les designers et décorateurs en pointe, le minimalisme dans la mode ou le mobilier est tendance et le numérique nous incite à ne pas entasser téléphones, télévisions, consoles de jeux, radios ou réveils, tout tient sur un écran.

Alors vive les déchetteries, les associations recycleuses, les kits d’urgence nous attendent dans les abris antiatomiques et dans les fusées, il n’y a pas de place pour le superflu. Devenir un membre de Zéro Waste France et ignorer le Black Friday serait déjà un premier pas vers la guérison. Pour conclure à l’image d’André Gide : « Tout ce que tu ne sais pas donner te possède ».

Vicky Sommet

Lire

Ça peut toujours servir de Guillemette Faure aux éditions Stock (avril 2018).
La vie en ordre de Margareta Magnusson aux éditions Flammarion (mai 2018).
Ranger, je range donc je suis de Virginie Temperman aux éditions Massin (mars 2017)

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