Sophie Papiernik, une tête bien faite

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Tous les matins, elle se rendait à pied à son travail et tous les matins, elle ne pouvait s’empêcher de regarder la vitrine de la modiste et ses très beaux chapeaux. Un soir, à la recherche d’un cadeau pour une dame très chic de Los Angeles qui devait déjà tout avoir, elle se décide à entrer dans la boutique pour acheter un vieille paille italienne et en profite pour regarder l’atelier, les moules en bois, les ouvrières en action et … c’est le coup de foudre ! Quand elle apprend quinze jours après que la modiste ferme boutique, elle prend sa décision. Sophie Papiernik quitte son travail de styliste, contracte un crédit, rachète tout le stock du magasin et se lance !

Et la boucle est bouclée

« Plus jeune, je me souviens, j’ai créé mon premier chapeau, mais j’ai un peu honte d’en parler, j’avais acheté un bois chez un antiquaire avant même de savoir que j’allais faire ce métier. Je l’avais décoré avec des fleurs en plastique que j’avais volées sur les tombes du cimetière de mon village ». Sophie Papiernik se prend d’amour pour le chapeau et se dit qu’il revient doucement à la mode. Avec trois nouveaux ennemis à combattre, la voiture, le vélo et le coiffeur, que des empêcheurs de tourner en rond ! (j’aurais pu dire rond de chapeau mais je me suis abstenue). Heureusement, les femmes aiment la fantaisie, veulent se différencier et si on y ajoute les besoins climatiques, les mariages, les concours d’élégance de voitures, les « belles » des champs de course, les concours d’attelages, elle a depuis 20 ans déjà « planté des graines comme dans un potager et ça pousse … ».

Une modiste modeste

Désuète et charmante, haute de plafond, avec un grande baie vitrée et une cheminée à l’ancienne, bruissant de crissements de tissus qu’on assemble et ornée de chapeaux, de plumes, de rubans, de perles et de galons accrochés aux murs, je suis entrée dans la Maison de Sophie Papiernik, modiste-chapelière. Et j’ai découvert ces bois aux tons chauds et aux formes variées qui vont du moule de béret à la capeline et de la toque à la cloche.

« Un chapeau se crée sur une forme et le tailleur se conçoit sur un mannequin. Le styliste doit respecter les mouvements du corps alors que pour le chapeau, on se situe dans l’espace. La seule obligation, c’est le tour de tête et l’architecture de l’ensemble pour qu’il tienne en équilibre et, à condition qu’il puisse passer les portes, nous n’avons aucune contrainte à respecter ! ».

La French touch

Pour se développer, Sophie Papiernik pense à l’exportation. Déjà présente en Angleterre, elle vient de recevoir une proposition chinoise. « La France n’a plus de royauté, une aristocratie qui s’embourgeoise et pas l’obligation de porter un chapeau comme autrefois où on ne sortait pas en cheveux, il faut donc faire naître de nouvelles envies et connaître les bonnes manières. Il y a des chapeaux d’intérieur mais on peut garder la tête couverte lors d’un déjeuner. En revanche, après 18h, c’est terminé. Pour le soir, je propose des bijoux de tête. Si on met un chapeau et qu’on l’oublie, alors on se sent bien ! Une femme peut se montrer arrogante, séductrice ou fière, le chapeau oblige à un certain maintien, vous autorise à oser être vous-mêmes ».

Tulles, mousselines et falbalas

« Le chapeau que je viens de terminer avec mon équipe » ajoute Sophie Papiernik, « je viens de le livrer à sa nouvelle propriétaire pour le Prix de Diane. C’est une énorme capeline avec une calotte Belle époque, donc plus large, environ 75 cm, remplie d’une parure de plumes de coq blanches avec deux panaches noir et doré en paille de bananier et des perles au centre. Si vous allez sur l’hippodrome de Chantilly ce dimanche 14 juin, vous la verrez certainement, juchée sur une tête princière. Moi, quand je sors, je mets un chapeau, parfois deux … et je sais qu’à ce moment-là, je libère quelque chose en moi. Le chapeau n’est pas un accessoire mais un vêtement à part entière. Et en Angleterre, c’est le chapeau qui fait la femme alors qu’en France, c’est la femme qui fait le chapeau ».

Vicky Sommet
Maison Sophie Papiernik – Sur rendez-vous au 01 46 34 72 30 – Show-room : 11, Rue Jules Chaplain 75006 Paris.

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