Le jeûne, détox intérieure

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Quand nous dé-jeûnons*, nous sortons du jeûne de la nuit… Mais qu’en est-il de celui pratiqué quand nous sommes éveillés ? Au-delà des pratiques religieuses ou spirituelles diverses en cours depuis des millénaires, pourquoi un tel engouement aujourd’hui pour cette pratique adoptée de façon complète ou partielle pour se soigner ou pour aller mieux ? 

Les phases du jeûne

Notre organisme a besoin toutes les six heures environ d’apports alimentaires et pourtant nous pouvons vivre plusieurs jours sans nous nourrir. En effet, notre corps s’adapte et met en place des voies de substitution pour faire face au manque de nourriture. Les premières 24 heures, notre organisme métabolise de façon habituelle en utilisant le glucose disponible. Les 5 jours suivants il pompe dans les réserves. Au-delà des 5 jours, foie et reins produisent des molécules de substitution afin de ne plus puiser dans les réserves. À ce stade, la vigilance du cerveau est aiguisée et la sensation de faim s’atténue (résultat de la production d’hormones stimulantes, cocktail euphorisant prisé par les adeptes du jeûne mystique en recherche de transcendance).

Quelle durée ?

Une pratique de jeûne encadrée excède rarement quatre semaines. Le surpoids augmente dit-on la résistance à la privation d’aliments (quarante jours en moyenne pour un sujet mince, 2 fois et demie pour un sujet obèse). Le record  appartient à un Écossais qui a jeûné 382 jours, passant de 207 à 82 kilos en 1966… Si la privation ne nourriture ne tue pas tout de suite, en revanche boire de l’eau sous toutes les formes (eau, bouillon, jus, tisanes, etc.) est indispensable (sans eau la mort se produit en quelques jours).

Le jeûne mystique

Jésus, Mahomet et Moïse ont jeûné dans le désert. Carême, ramadan, Yom Kippur, christianisme, judaïsme et islam proposent d’observer le jeûne. La durée et le temps varient, mais les trois religions monothéistes parlent de se recentrer sur le spirituel, d’augmenter la puissance de la prière et de s’ouvrir au monde et aux autres.

« C’est ainsi que j’ai compris que le sens de cette pratique immémoriale n’est pas de me faire violence, qu’elle n’est pas contre-nature, mais que, bien au contraire, c’est un chemin corporel de transformation et de nettoyage intérieur. Il me conduit vers mon moi profond, vers la chambre intérieure du silence ».
Anselm Grün, père bénédictin, docteur en théologie.

Affamer les tumeurs ?

Le jeûne pratiqué 48 heures avant une séance de chimiothérapie permet semble-t-il d’en accroître l’efficacité et de mieux en supporter les effets secondaires. De plus en plus de patients ont d’ores et déjà commencé volontairement des jeûnes en préparation de leur chimio, même si les médecins restent très réservés sur le sujet (notamment en France) et n’en parlent pas officiellement en attendant les résultats d’études menées sur le sujet, au motif que la dénutrition rend par ailleurs plus vulnérable à la maladie.

De marche et d’eau fraîche…

De nombreuses cliniques en Allemagne proposent des séjours médicalisés jeûne et randonnée selon la méthode Otto Buchinger** afin de soulager certains maux physiologiques (asthme, diabète, hypertension, inflammations chroniques, manifestations allergiques, migraines, obésité, rhumatismes, tabagisme). On pourrait plutôt parler de diète puisque qu’au programme sont bues tout au long de la journée eau, jus de fruits, légumes et tisanes, en association à la marche, pour une durée prescrite à l’arrivée par un médecin, variant en fonction de votre pathologie et de votre condition physique. Ce type de jeûne se développe en France : Jeûne et Randonnée propose 400 stages dans 50 lieux différents tout comme Joli-Jeûne.

Notre but n’est ni thérapeutique, ni médical, ni spirituel ou religieux ; il s’agit de faire une pause pour retrouver un peu de notre vitalité perdue dans une vie souvent trop marquée par le stress et le surmenage.  En même temps, vous allez perdre du poids mais la perte de poids est un effet secondaire de la diète hydrique qui est avant tout un moyen de retrouver l’équilibre et la vitalité qui est en vous. Une pause.fr

Jeûner dans le corps pour jeûner dans l’esprit

La pratique du jeûne, quand elle n’est pas mystique, reste liée aux sociétés comme les nôtres où règne l’abondance. Et si jeûner partiellement et avec modération (se passer de café, alcool, sucreries ou charcuterie) nous permettait de ne plus compenser notre sentiment de frustration par des aliments, de se décentrer, d’avoir un surcroît de lucidité, de mieux distinguer les attitudes négatives qui nous empoisonnent (addiction au travail, ambition mal placée, manque de confiance en soi, perfectionnisme, peur des conflits) ? Cela peut aussi être de se demander à quoi nous sommes dépendants et nous entraîner de temps à autre à jeûner de télévision ou de voiture, de jeux vidéos ou d’internet, de tabac… L’effort est toujours le même : quelque chose à voir avec l’idée d’exercice, faire un programme et s’y tenir.

Marie-Hélène Cossé

*En espagnol desayuno et en anglais break(fast).
**Otto Buchinger, médecin allemand (1878-1966, est connu pour avoir popularisé le jeûne thérapeutique en Europe de l’Ouest.  Atteint d’une inflammation sévère des articulations, il entreprend 19 jours de jeûne qui l’en guérissent et ouvre un centre à Überlingen en 1958. Sa fille, puis aujourd’hui son petit-fils et son épouse, Dr Françoise Wilhemli de Toledo, poursuivent aujourd’hui son œuvre. Buchinger Wilhemi
À LIRE : L’Art de jeûner, manuel du jeûne thérapeutique Buchinger, Françoise Wilhelmi de Toledo (Éd. Jouvence, 2005,158 p.)
Le jeûne. Prier avec le corps et l’esprit, Anselm Grün (Éd. Mediaspaul)

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