De l’audace face à l’ordre moral, une voix et une sensibilité singulières, l’originalité de son imaginaire, tels sont les critères retenus pour qu’une œuvre soit sélectionnée pour le Prix Anaïs Nin décerné cette semaine. Découvrons les livres des cinq finalistes et le nom de la gagnante.
Pourquoi un nouveau prix littéraire ? Créé par les auteures Nelly Alard et Capucine Motte* en 2015, doté de 3.000 euros, c’est le seul prix littéraire français destiné à faire découvrir de jeunes auteurs français contemporains à l’international et à promouvoir le livre élu auprès des éditeurs anglais et américains. Virginie Despentes remporte le prix de la première édition 2015 avec son roman Vernon Subutex 1 (lire notre article).
Quels étaient les cinq livres finalistes sélectionnés ?
Philippe Jaenada, La petite femelle (Éd. Julliard – août 2015 – 720 pages) ou l’étonnant procès de Pauline Dubuisson en 1953, accusée d’avoir tué son amant et risquant la peine de mort. Qui est-elle vraiment ? L’auteur lui rend justice en menant une enquête quasi-policière.
Patrick Lapeyre, La splendeur dans l’herbe (Éd. POL – janvier 2016) ou le portrait d’un couple de perdants, Homer et Sybil, qui se rencontrent un peu par hasard après avoir été quittés par leurs conjoints et nouent une étrange relation amoureuse basée sur la conversation et les confidences.
Monica Sabolo, Crans Montana (Éd. J.C. Lattès – août 2015), le récit autofiction d’une jeunesse, celle de ses parents dans les années 60 dans la station chic de Crans-Montana, la description nostalgique d’une génération née juste après la guerre qui voulait avant tout s’amuser.
Camille Laurens, Celle que vous croyez (Éd. Gallimard – janvier 2016 – 192 pages), le vertigineux récit de la dangereuse liaison d’une femme sur les réseaux sociaux, Claire, 48 ans, qui pour ne pas renoncer au désir va jusqu’à manipuler son identité avant de tomber dans la dépression et la folie. Récit d’une descente aux enfers…
Emmanuelle Richard, Pour la peau (Éd. de l’Olivier – janvier 2016), roman intense qui conte l’histoire d’une passion violente totale, obsédante entre une femme et un homme plus âgé de 20 ans : désir, attente, peur, manque de l’autre, plaisir, bonheur, faiblesses, chute, tout y est. Un livre sur les ressentis.
Quel était le jury 2016 ? Il était constitué, comme en 2015, d’écrivains français et d’agents littéraires anglais et américains, notamment : Mohammed Aïssaoui, Nelly Alard et Capucine Motte, co-fondatrices du prix Anaïs Nin, Antonin Baudry, Virginie Despentes, Présidente d’honneur du Prix Anaïs Nin, David Foenkinos, Judith Housez-Aubry, Véronique Ovaldé et Karine Tuil.
La gagnante ? Pour la peau d’Emmanuelle Richard (deuxième roman de l’auteure après La Légèreté en 2014) l’a emporté au deuxième tour de scrutin, par 7 voix contre 6 pour Camille Laurens.
« La première fois que je vois E. je le trouve quelconque sinon laid. Il a le teint gris et il fume, ce sont les seules choses que je remarque… »
Notre gagnante ? Celle que vous croyez, magnifique récit construit sur plusieurs tableaux de l’agrégée de lettres Camille Laurens qui s’interroge sur le temps qui passe, le désir au féminin et la vérité de l’amour au temps des réseaux sociaux… Des vraies questions de midetplus !
Marie-Hélène Cossé

Capucine Motte
*Nelly Alard, comédienne de théâtre et de télévision, scénariste, journaliste au magazine Télérama, romancière, a publié un roman en 2013 Moment d’un couple publié chez Folio début janvier.
Capucine Motte, romancière, La Vraie Vie des jolies filles (Lattès), 2010 ; et le très joli livre Apollinaria : une passion russe, (Lattès), 2013, Prix Roger Nimier.
Pourquoi Anaïs Nin ?
Révélée par ses journaux intimes écrits sur plusieurs décennies, offrant une vision profonde de sa vie privée et de ses relations, cette américaine d’origine franco-cubaine (1903-1977) a été sans doute un des seuls écrivains à avoir été traduit à la fois du français vers l’anglais et de l’anglais vers le français. Ses thèmes : la libération des désirs de la femme écrits noir sur blanc. Son ton ? D’une grande liberté, une écriture fine, adroite et sensuelle, un symbole de liberté face à l’ordre moral, un désir d’agrandir le champ de la conscience, le sexe en étant un moyen.