Hier à Liège à la Philarmonique, demain à Paris et ailleurs, les conférences autour du vivant se multiplient, donnant aux salles de spectacle un nouveau souffle inspirant. Panser le vivant s’écrit parfois penser le vivant pour nos cerveaux souvent avides d’explications, de réconfort, pour changer leur façon de faire et d’être.
D’un cerveau à l’autre
Au cours d’un dialogue à la Philarmonique le 6 octobre dernier avec Steven Laureys, neurologue¹, le moine bouddhiste Matthieu Ricard a souligné que nous partageons avec les animaux la qualité d’êtres sensibles et l’aspiration partagée d’échapper à la douleur, la souffrance et à ce qui menace notre intégrité mentale. Marc Vandenheede, vétérinaire et professeur d’éthologie, a souligné la reconnaissance que nous devions aux animaux de laboratoire pour leur contribution à nos avancées scientifiques. La compréhension de la sentience commune qui nous unit au sein du vivant nous permet d’avoir de la considération pour les autres, dont nous sommes interdépendants. C’est la clé pour nous ouvrir à l’altruisme, donc souhaiter le bien de l’autre, qui passe par l’empathie, cette résonance affective et cognitive qui nous permet de ressentir et comprendre l’autre en nous mettant à sa place. Empathie qui se prolonge par la compassion, la capacité d’agir pour que l’autre ne souffre pas.
La compassion est une véritable antidote au burn out, qui est causé dans 80% des cas par la détresse empathique – le soignant ou l’aidant s’épuisant émotionnellement face à la souffrance de l’autre. Dans 20% des cas de burn out, le mal-être vient d’être en porte-à-faux entre ses patients et sa hiérarchie.
Pour une éthique de la terre
L’interdépendance qui est la nôtre, au sein de l’environnement et au milieu des 8 millions d’espèces animales qui partagent notre planète, doit nous conduire à une question éthique et morale : avons-nous des devoirs à l’égard des animaux ? Pour la philosophe Florence Caeymaex, le souci du bien-être animal s’enracine dans un questionnement éthique qui met en jeu notre relation à la terre et aux êtres qui la peuplent, sur toile de fond d’une crise écologique sans précédent. L’usage que nous avons fait du monde depuis trois siècles, sans vergogne ni respect, interroge aujourd’hui nos consciences, dans l’urgence de changer profondément nos comportements.
La communauté à laquelle nous appartenons inclut la nature, les sols, l’eau, les plantes, les animaux, l’homme n’étant finalement, comme l’écrivait Aldo Leopold, qu’un « membre parmi d’autres d’une équipe biotique ». Avec aujourd’hui une responsabilité pleine et entière de chacun à revoir et surtout transformer son usage du monde, pour vivre tous ensemble respectueusement.
Anne-Claire Gagnon
Mid&Flandres
¹qui dit volontiers de ce dernier qu’il est « son cobaye préféré », puisque l’un et l’autre participent aux travaux du GIGA-Consciousness, publiés dans les revues scientifiques, sur le fonctionnement du cerveau.
La conférence Bien-être des hommes, bien-être des animaux a été organisée le 6 octobre à Liège.
Lire Almanach d’un comté des sables d’Aldo Leopold (éditions Flammarion, 1949)
Assister à la conférence Les animaux et nous le 9 décembre au Théâtre de l’Atelier à Paris