Kenzo ou le reflet d’une décennie joyeuse et insouciante

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À l’instar de Christian Dior pour les années 50, Yves Saint-Laurent pour les années 60, les années 70 seront à l’évidence celles de Kenzo. À l’aube de l’an 2000, le styliste au franc sourire et au regard bienveillant tirera sa révérence avec un dernier défilé féérique, célébrant 30 années de création et de succès. 20 ans après, il nous quitte. Rendons hommage au plus parisien des couturiers japonais.

« La mode n’est pas réservée à quelques uns. Elle est pour tout le monde et ne doit pas être trop sérieuse. » Kenzo Takada (1972)

Paris : Le jeune Kenzo Takada en rêve !

C’est en 1964, tout juste diplômé du Bunka Fashion College, que le jeune styliste quitte son Japon natal et s’embarque pour un long périple qui changera  à jamais sa vie et…. le monde de la mode. Kenzo Takada découvre alors un Paris gris et froid. Les premiers mois de vie parisienne n’ont rien d’un rêve éveillé. L’inconfort d’une chambre de bonne ne l’empêche pas de dessiner inlassablement et vendre ses croquis à des maisons de couture comme Courrèges ou Louis Féraud. En 1970, il s’installe dans une minuscule boutique de la Galerie Vivienne. Inspiré par son coup de foudre pour une toile d’Henri Rousseau (Le rêve, 1910), il imagine pour cet espace un décor de jungle luxuriante, poétique et mystérieuse. Ce monde onirique et naïf du peintre va jouer un rôle crucial  dans l’identité de ses premières collections. Jungle Map est né !

Imprimés joyeux et couleurs vibrantes : Kenzo Takada chahute son temps, bouscule les codes couture de l’époque, enfreignant les règles avec irrévérence et un talent immense.

La mode s’ennuyait, les rédactrices de mode s’emballent, le magazine ELLE lui consacre une couverture, c’est le début du succès ! Entre héritage parisien et rigueur nipponne, orient et occident, modernité et romantisme, motifs animaliers ou floraux, tissus japonais ou cotons locaux, Kenzo Takada ne va pas cesser d’inventer une mode féminine à part, exubérante, colorée, jeune et abordable.

Adieu Jungle Jap, bonjour Kenzo

En 1976, Jungle Jap disparaît : la marque porte désormais  le seul prénom du styliste, jugé plus  percutant, Kenzo, et s’installe place des Victoires, adresse qui deviendra emblématique de la marque. Kenzo ouvre la voie à toute une génération de créateurs japonais. Dans les années 80, Issey Miyake, Yojhi Yamamoto, Rei Kawabuko (Comme des Garçons) s’installent à Paris. Contrairement à leur compatriote, ils proposent des collections sombres, conceptuelles, des vêtements sévères, déconstruits,  en rupture avec un occident élégant. La liberté de ton du plus français des japonais continue  d’évoluer dans un style coloré aux multiples influences exotiques et folkloriques. Les somptueuses images des campagnes de publicité, shootées à l’époque par Hans Feuer, restent un fabuleux hommage à l’univers poétique et chamarré de Kenzo.

« Kenzo avait un rapport moins solennel au vêtement que ses contemporains. Il avait de l’humour et l’envie de voir ses créations portées dans la rue. » témoigne Tiffany Godoy, spécialiste de la mode japonaise

En 1993, Kenzo Takada vend sa maison de couture au groupe LVMH avant de se retirer 6 ans plus tard. Monsieur Takada s’éclipse… Kenzo survit. Néanmoins, probablement parce qu’il faisait fi des tendances et parce que sa mode libre et exubérante était le reflet d’une décennie joyeuse et insouciante, l’univers qu’il a imaginé reste sans pareil. Merci Monsieur Kenzo Takada pour ce voyage enchanteur !

Nostalgique de cette allure joyeuse ? Etro, Marni, Erdem : voici trois noms, trois marques à découvrir pour une mode poétique et colorée.

Véronique de Labarre
Créatrice du site d’accessoires de mode en ligne Tipthara

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