Cette saleté de virus n’aura pas notre peau. Ne pas grossir, ne pas perdre de muscle, ne pas être désagréable avec ses proches et continuer à faire fonctionner sa cervelle. C’est le vœu pieux que je formule depuis le 17 mars. À voir si mon programme vous fait sourire…
– Réveillée à 6 h du matin. Tout est silencieux. Je fais des mots fléchés au lit, quelques réussites, un peu de lecture et à 7 h, j’entame dans mon deux-pièces (pas le maillot de bains) ce que j’appelle mon premier « marathon » quotidien. J’ai évalué la distance du parcours à quatre pattes sur le sol avec un ruban à mesurer. Il fait 12,30 mètres de long. Pour marcher un kilomètre je dois donc arpenter environ 80 fois cette distance. Comme j’augmente chaque jour ma performance, j’en suis à environ vingt aller-retours par tranche que je saucissonne entre d’autres activités. Et, croyez-moi, ça me donne le tournis.
– 9 h, ménage de la salle de bains après la douche. Je me crème un jour sur deux pour éviter la queue à la pharmacie. J’ouvre mon ordinateur. Je travaille. J’y retourne à toute heure du jour ou de la nuit, quand une nouvelle idée m’assaille.
– 10 h 20 : premier bruit des voisins du dessus. Normal, ils se couchent à minuit. Ils allument la radio ou la télé. Puis j’entends des pas, de l’eau qui coule, … Le bambin d’environ 5 ans dort encore. Oui, celui qui tape des pieds sur leur parquet non insonorisé, court, fait des caprices ou chante à tue-tête (je ne sais pas finalement si je préfère les colères ou la joie !). En temps normal il m’exaspère : qu’il aille prendre l’air. Actuellement je le plains sincèrement. Il est confiné pour problèmes respiratoires chroniques. Comme quoi la façon de supporter les bruits dépend du contexte.
– 11 h 20 : première cavalcade. Des objets tombent par terre. Plus tard ce sera les billes, les voitures et autres objets que l’on traîne, … Éternuements d’un adulte. Cris du père qui gronde son fils. Bruits de meubles que l’on pousse. La mère s’y met. J’entends tout cela en poursuivant mon marathon. J’en suis à 2 kms. Mon record d’hier étant de 5,6 km, il semblerait qu’aujourd’hui je sois enragée. Il faut dire que mon agenda est d’une blancheur limpide. Rien à faire. Personne à appeler. J’ai fait deux tentatives dans la matinée : occupé.
– 11 h 50, je pense au déjeuner. Je marche un peu pour oublier. Ensuite je prépare le repas qui était déjà prêt de la veille et je regarde les 12 coups de midi pour vérifier que le Breton est toujours là. J’ai mon repas sur les genoux. Après deux appels téléphoniques pendant lesquels je marche je m’installe devant un mauvais film à la télé. J’ai récupéré des filtres pour anciennes cafetières que je vais (ou pas) transformer en masques en les recouvrant d’un tissu à ourler. Demain j’irai au supermarché. J’ai réussi à tenir huit jours. Sans sortir.
– La fin de journée passe entre mots fléchés, marche, cartes, marche, téléphone en marchant, … Aujourd’hui, j’ai atteint plus de 7 kilomètres ! Oui, vraiment, la tête me tourne, inutile de prendre l’apéro. À huit heures je m’affale devant les infos, je dîne et quand le programme n’est pas top, je lis, j’écris, je réfléchis.
– 23 h. Les voisins se couchent propres : ils font couler l’eau des bains.
Enfin et pour terminer, j’ai remarqué que mes fesses s’étaient arrondies. Ce sont sûrement les muscles, pas les madeleines…
Isabelle Brisson