N’ayant pas encore opté pour le look Sophie Fontanel, le fameux « going grey », il m’a fallu moins d’une semaine pour réaliser que je pourrai bientôt avoir un problème nuisant sérieusement à ma santé morale par ces temps de confinement…
Confinée et dépeignée
Plus de coiffeur et plus de décoloration ou plutôt coloration en ce qui me concerne, nos professionnels du secteur dont j’étais une fidèle abonnée ayant mis la clé sous la porte temporairement (chômage technique)… Eux, n’ont pas tardé à nous mettre en face de nos problèmes avec humour, faisant le tour des réseaux sociaux avec des : « Dans deux mois, 99 % des blondes auront disparu de la surface de la terre » ou « Bientôt on connaîtra la couleur naturelle de tout le monde »… Drôlissime ! Comment, en effet, renoncer à cette ambiance, douillette et réparatrice, où on vous présente des petites mèches de cheveux prenant la forme d’une boucle qui ressemblent à la palette d’un peintre pour que vous puissiez choisir entre auburn flamboyant, brun ambré ou blond cendré, où on vous demande si vous voulez un soin et un petit massage du scalp revigorant ou apaisant ? Et surtout nous laisserons-nous coloniser par ces racines envahissantes ?
Oui, certes, la fameuse Sophie a beau dire que les cheveux blancs c’est l’arrêt du mensonge, une quête de vérité et une nudité qui oblige à être soi, sans tricher, une entrée dans un monde de lumière car le blanc prend très bien la lumière, suis-je prête à être confinée et décoiffée/dépeignée ?
Crise sanitaire et capillaire
Le coiffeur fait partie de ces artisans nécessaires à la douceur de vivre aussi bien de notre urbanité, de notre ruralité que de notre périphérie et un confident toutes catégories sociales confondues. Il est vrai que pour s’acheter des colorations à faire à la maison, nos élites, conscientes du problème, ont immédiatement appelé leurs fournisseurs habituels des grandes enseignes, d’autres ont fait le plein dans les supermarchés et j’ai moi-même acheté en ligne un maquilleur de racines « acajou » (pas tout à fait ma couleur, mais on fera avec…) et il y avait déjà presque rupture de stock !
Saviez-vous que beaucoup de marques ont opté pour la solidarité ? Plus de 2 000 salons donnent leurs stocks de gants et de produits désinfectants aux pharmaciens et quelques grands groupes accélèrent la fabrication de gel hydroalcoolique. Cela mérite d’y retourner très vite, dès que cette crise sanitaire, qui est aussi une crise capillaire, aura cessé !
Oui, je sais, par les temps qui courent, il y a des choses plus graves… « Mais à quoi bon vivre, pensait-elle, si ce n’est pas pour être vue ? » (Leila Slimani, Le pays des autres) ou au moins à être vue par moi-même, pensais-je…
Anne-Marie Chust