Si l’Hexagone de Descartes l’a longtemps boudée contrairement aux continents asiatiques où elle est née et au monde anglo-saxon qui l’a adoptée dans les sixties, la déferlante méditation a désormais touché notre pays : livres, revues, conférences, stages, tous en parlent ! Présente à l’hôpital, développée dans l’entreprise, adoptée dans certaines écoles. Pourquoi cet engouement ? Éclairage sur les bienfaits de la pratique, mais aussi ses éventuelles dérives.
Historique. Voilà plus de deux millénaires qu’on médite en Orient et en Occident, rien de nouveau donc, mais il s’agissait avant tout de pratiques religieuses ou spirituelles. Si la méditation apparaît à la fin des années 1950 aux États-Unis, c’est en 1980 que le biologiste américain adepte de yoga, Jon Kabat-Zinn, donne le vrai coup d’envoi en Occident : il s’inspire de la méditation bouddhiste et crée le mindfulness¹ (pleine conscience). Il n’existe cependant pas une, mais de nombreuses, techniques de méditation selon les traditions (mindfulness, tibétaine, vipassana, zen…), différentes dans la pratique mais aboutissant à un état méditatif dont les bénéfices sont universels.
Qu’est-ce que méditer ?
Il ne s’agit pas de ne pas penser, mais de ramener l’attention à l’instant présent, être là, ici et maintenant, en pleine conscience. Méditer demande d’être dans le calme, suspendre ses activités habituelles, se déconnecter du monde extérieur pour se recentrer sur soi-même, s’accorder une pause dans la frénésie de nos agendas surchargés, offrir un moment précieux d’immobilité à son corps. Cela demande également un effort de concentration : ramener à l’état présent l’esprit habitué à ressasser le passé ou se projeter dans l’avenir.
Mode d’emploi. S’installer confortablement (sur une chaise si le corps ne permet pas au départ de s’asseoir sur le sol en tailleur) et dans un endroit calme pour faire la transition avec le monde extérieur agité. Dos et cou doivent être droits (idéalement sans avoir à s’appuyer contre un support) sur un bas du corps stable. Il convient ensuite de se concentrer sur un objet pour développer ses capacités d’attention. Selon les techniques, l’objet peut être la respiration, la flamme d’une bougie, la répétition d’un mantra, une image/icône ayant une signification personnelle particulière, etc. Au fur et à mesure de la pratique, l’esprit s’habitue à être focalisé, devient plus docile et s’apaise plus facilement.
Quelle fréquence ? Idéalement matin et soir pour ouvrir et clore la journée, l’important étant de trouver son rythme et développer une approche personnalisée. Le corps et l’esprit risquent fort de se rebeller au départ (douleur physique, toutes les excuses mentales possibles et imaginables)… Pour commencer, s’asseoir ne serait-ce que 5 minutes deux fois par jour, c’est déjà très bien et beaucoup mieux que rien. Par la suite, et à force de pratique régulière soutenue, il est fort probable que la durée s’allonge naturellement vers les… 20 à 30 minutes que certains professeurs et médecins recommandent !
Les bienfaits. Nous sommes souvent préoccupés, inquiets, perdus dans nos pensées. Méditer c’est apporter du calme par rapport au stress quotidien, prendre du temps, ne pas céder à l’urgence, lutter contre le déficit croissant d’attention dont souffrent nos esprits sans cesse sous tension et fragmentés : à quel intervalle vérifions-nous nos e-mails et nos textos ? combien de sujets traitons-nous en même temps ? Ceux qui méditent régulièrement affirment que leur journée se déroule mieux, qu’ils abordent mieux les problèmes, gèrent mieux leurs émotions ou leurs relations aux autres, que leur prise de bonnes décisions est facilitée.
Les vertus thérapeutiques
Elles sont désormais reconnues, notamment en milieu hospitalier. Il est prouvé que le cerveau se modifie sous l’effet de la méditation (renforcement du système immunitaire par une pratique régulière de 30 minutes par jour) et qu’elle agit dans les états dépressifs et anxieux, addictions, troubles du comportement alimentaire. Si elle ne se soustrait pas à une prise en charge médicale dans les cas indiqués, elle permet en revanche de mieux vivre, de devenir autonome dans sa maladie et de se reprendre en main.
Erreurs et dérives. Si vous méditez uniquement pour être moins stressé ou vous détendre momentanément le temps d’une séance sur un coussin, il s’agit de sophrologie ou de relaxation, mais pas de méditation au sens propre du terme. Attention aussi, comme dans toute nouvelle mode, aux excès de marketing et aux opportunistes, voire charlatans, qui s’engouffrent dans ce nouveau filon sans aucune formation. Si vous suivez des cours, il faut bien regarder qui les dispense.
Et maintenant ? Méditer c’est s’offrir des moments où l’on peut se retrouver dans le silence, le calme, la lenteur. Il s’agit d’un véritable mind training qui peut être prolongé et développé dans la vie de tous les jours au-delà d’un sitting formel dans le silence et la position assise : faire une retraite dans un couvent, marcher sur la route de Compostelle, dîner en silence… On peut aussi méditer à tout moment de la journée sans avoir besoin de lieu de retraite, de professeur ou de départ sur le Chemin : marcher, balayer, faire un puzzle, dans les embouteillages, regarder le feu brûler dans la cheminée une soirée entière comme autrefois ou bien écrire un article pour Mid&Plus…
Venus chercher l’apaisement dans la méditation et si nous en repartions avec la sagesse et la bienveillance ?
Marie-Hélène Cossé
À quatre mains avec Côme L., voyageur nomade.
¹Le Mindfulness est né aux États-Unis dans les années 1980 afin de soulager stress et souffrance des malades. En France ? Elle entre à l’hôpital dans les années 2000 sous l’impulsion de quelques médecins dont Christophe André, psychiatre à l’Hôpital Sainte-Anne à Paris. La méditation a aujourd’hui son diplôme universitaire. Méditer jour après jour, 25 leçons pour vivre en pleine conscience, Christophe André (Éd. L’Iconoclaste, septembre 2011). Deux liens pour méditer qui cartonnent l’une aux États-Unis Headspace, l’autre en France Petit Bambou et une vidéo de méditation guidée par Christophe André (11’25).