Après la vague d’émancipation du féminisme des années 1970, viennent les diktats hérités des années 1980 : « être à la fois coquette, professionnelle, accomplie, mère dévouée », en un mot la « femme parfaite », contre lesquels s’élèvent les voix des femmes d’aujourd’hui, trente ans après. Et si on en finissait avec le culte de la perfection ? L’émancipation nous a poussées à faire toujours plus et toujours mieux. Mais est-ce que pouvoir tout faire justifie de devoir tout faire ? Nous sommes tiraillées entre notre vie professionnelle et notre vie personnelle, ce n’est pas nouveau, mais le « mal-être » est plus fréquent chez nous : nous consommons plus de tranquillisants que les hommes (voir notre article du 4 juin 2014 – Baille Baille BZP) et sommes plus exposées au burn-out. L’heure est donc aujourd’hui à cesser de vouloir être bonne en tout, à cultiver le côté cool sans s’en inquiéter et à s’affranchir des idées reçues.
Le diktat le plus important et non le moindre n’est-il pas celui de l’apparence ? 2 % des femmes seulement se trouvent belles, quel dommage ! Comprendre avant tout que la plupart des photos des magazines sont photoshopées. La marque Dove a dénoncé ce phénomène en 2006 dans une vidéo qui montre une femme au naturel qui est maquillée, coiffée, photographiée et photoshopée pour une campagne de publicité. L’image finale est bien loin de l’image initiale…
Il est temps que la société change son regard sur les femmes et la vieillesse… Si avant les quinquagénaires et plus étaient invitées à se retirer de la scène publique, aujourd’hui les lignes de maquillage font appel à de troublantes « sexygénaires » : Charlotte Rampling, 68 ans, pour la marque Nars et Jessica Lange, 65 ans, pour Marc Jacobs Beauty. Catherine Deneuve, 71 ans, a été récemment photographiée en body de dentelle par Dominique Issermann pour le New York Times. L’actrice préférée des français, Sophie Marceau, dit dans un interview récent à Elle : « Vieillir ne doit pas être vu comme la fin de la séduction. Il restera ce que j’aime tant, l’échange, le charme, l’entente intellectuelle. D’ailleurs, dans la rue, ce sont les hommes très jeunes qui se retournent sur moi! ». La chirurgie des visages et des corps ? Pourquoi pas, si c’est pour mieux accepter son visage et son corps tels qu’ils ont évolué et non pas pour effacer le temps qui passe et qu’on n’arrive pas à digérer.
La quête perfectionniste peut être liée à une mauvaise estime de soi remontant à l’enfance (voir notre article du 19 juin 2014 – Dis-moi miroir). L’exercice de la parole et du partage des idées est souvent une bonne arme « anti-perfectionnisme ». Croyez-moi : mettre fin au culte de la perfection c’est passer de la prisonnière qui ne prend plus plaisir à rien (car elle en fait trop) à celle qui a compris qu’elle ne peut pas tout faire à fond et fait donc des choix en fonction de ses priorités et de ses goûts.
Marie-Hélène Cossé
Devenir femme au sein du triangle familial, Dr. Moussa Nabati (Éd. Dervy)
Le choix des femmes, Dr. Fatma Bouvet de la Maisonneuve (Éd. Odile Jacob)
Wonder women : sex, power and the quest for perfection, Debora L. Spar