Box Office d’automne

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Notre équipe vous a concocté un chouette programme de rentrée aux petits oignons. Une expo, une pièce, une série, un film, il y en a pour tous les goûts, voilà bien la marque de l’éclectisme des membres qui la compose.

♦ Une exposition par Christine Fleurot :
Géographie de la mémoire de Sally Gabori
Fondation Cartier, jusqu’au 6 novembre 2022 – Projet immersif en ligne

Considérée aujourd’hui comme une des plus grandes artistes australiennes contemporaines Mirdidingkingathi Juwarnda Sally Gabori est exposée pour la première fois en France. Née en 1922, tresseuse de filets de pêche, elle est arrachée à son île natale suite à un cyclone (1947) et exilée par les colons presbytériens sur une île voisine. Ce n’est qu’à 80 ans (2005) qu’elle découvre la peinture dans un centre d’art. En rupture avec la tradition esthétique aborigène, Sally Gabori s’exprime à travers une langue picturale personnelle en totale liberté formelle, instinctive. Son déchiffrage peut être complexe mais il faut aussi savoir se laisser porter par un œil émotionnel. Lacs ? Marais salants ? Écume ? Cyclone ? Sable ? Portrait en creux de son mari ? La couleur et la lumière explosent où s’adoucissent selon les salles.

« Voici ma terre, voici ma mer, voici celle que je suis. »

Apprenant que Sally Gabori peignait en chantant on comprend alors que son œuvre est un chant politique,  plainte face aux souvenirs douloureux du déracinement et de l’absence. Une partition reprise en chœur aujourd’hui par ses filles détentrices désormais de ce précieux legs mémoriel qui devront trouver leur propre expression.

 


♦ Une pièce de théâtre par Michèle Robach :
Final Cut
Théâtre de Belleville jusqu’au 27 novembre 2022

Dans un texte finement agencé, Myriam Saduis autrice et interprète, recompose le puzzle familial dans le contexte historique de la colonisation. Une expérience personnelle sur la recherche des racines qui s’appuie sur des références culturelles, à la fois littéraires avec Marguerite Duras (Le ravissement de Lol V Stein) et Tchekhov (La Mouette) ou musicales avec Michel Legrand (Les parapluies de Cherbourg), Barbara et Serge Reggiani. Un spectacle fort, bourré d’élan vital où l’intime rejoint le collectif !

♦ Une série par Anne-Marie Chust :
Extraordinaire Avocate Woo¹
Diffusé sur Netflix
©Netflix - Extraordinaire avocate Woo
Bien sûr, il faut surmonter cette affaire en coréen… c’est en VO avec sous-titres en français et pas de version doublée à disposition. Habituellement, je déteste les versions doublées, mais là j’avoue que 16 épisodes de plus d’une heure en coréen, cela donne à réfléchir avant de se lancer donc j’ai un peu hésité… mais au bout des 15 premières minutes j’étais saisie, happée, c’est plus que vraiment bien !

Avocate de génie autiste, Woo Young-woo, merveilleusement jolie et délicate, débarque avec sa coupe au bol, ses tailleurs au carré, son côté étrange et bizarre mais profondément honnête, sa phobie des portes tournantes, ses costumes en forme de carré et sa présentation à l’envers-à-l ‘endroit (vous verrez…). Elle a des difficultés pour comprendre les gens et une fâcheuse tendance à dire ce qu’elle pense et à parler de baleines les yeux écarquillés, ces baleines dont elle sait tout, qui l’aident à mieux comprendre la vie et la transportent au rythme d’une musique de vagues (genre Naturalia¹). La série n’oublie pas pour autant d’aborder des sujets probablement tabous dans la société coréenne, comme les réfugiés de Corée du Nord, les violences faîtes aux femmes, les situations de handicap, la justice manipulée, mais tout cela est dépeint avec une incroyable justesse et sans didactisme. Une série poétique et bienveillante. Tous les acteurs sont géniaux mais surtout retenez le nom (le vrai) de notre extraordinaire avocate Woo, Park Eun-bin. Vous n’oublierez pas² !

¹La musique de la série est entièrement composée par Kim Seung-yeol, dont l’album Extraordinary Attorney Woo (Original Television Soundtrack) a atteint le douzième rang dans le Circle Album Chart.
²AStory (an), la société de production pour Extraordinary Attorney Woo, confirme qu’une deuxième saison de la série est prévue en 2024.

♦ Un film par Brigitte Leprince :
Kompromat de Jérôme Salle avec Gilles Lellouche, Joanna Kulig, Louis-Do de Lencquesaing
En salle depuis le 7 septembre

Le thriller français de la rentrée m’a plutôt convaincue. D’après un scénario de Caryl Ferey, Jérôme Salle s’est emparé du destin de Mathieu Roussel. Ce directeur de l’Alliance française travaillant en Sibérie, rôle remarquablement incarné par Gilles Lellouche, est arrêté sous les yeux de sa fille. Il est victime d’un « kompromat », méthode qui consiste à créer de faux documents compromettants pour nuire à une personne gênante. Nous vivons la fuite haletante de Mathieu avec parfois des passages un peu « eau de rose », invraisemblables et caricaturaux. Ceux-ci sont heureusement compensés par l’interprétation et le talent du comédien principal.

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