Un thriller végétal : écrire pour faire réagir

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Journaliste spécialisée dans les interviews des grands « décideurs » politiques de ce monde, Brigitte Adès se tourne vers la fiction pour répondre à ses indignations. Son deuxième roman¹, bien dans l’actualité, sur fond de pandémie et de recherche de nouvelles molécules, traite du devenir des plantes et des arbres afin que le pillage génétique cesse et que ces trésors puissent rester accessibles à tous demain.

« J’ai toujours voulu écrire de la fiction, c’est un moyen de toucher les gens plus profondément. Mes lecteurs ne liraient pas un article de fond, mais ils acceptent de se plonger dans les sujets sérieux pour comprendre en se distrayant. J’écris pour alerter et faire réagir. »

Du Kenya au Brésil en passant par Londres

Après un premier roman² où l’auteure, indignée par les amalgames entre l’Islam éclairé et le radicalisme, évoquait à travers l’amitié de deux Franco-Iraniens les difficultés des jeunes musulmans de se trouver un destin en Occident, Brigitte Adès a choisi le Kenya comme toile de fond pour son deuxième livre en s’intéressant au sort des plantes convoitées pour leurs propriétés soignantes et que des laboratoires étrangers cherchent à breveter, privant ainsi le pays de ressources précieuses. Deux ans de recherche ont été nécessaires avant d’entamer l’écriture.

« Je n’ai pas mis le quart des connaissances acquises pour ne pas lasser le lecteur » explique la journaliste d’investigation.

Tous les personnages sont liés par la passion commune des végétaux qui les anime : l’héroïne Vera, jeune Anglaise venant d’hériter au Kenya de la réserve de ses parents qu’elle souhaite faire revivre, son frère de lait, Marius, combattant les grands laboratoires qui, sans scrupules, font main basse sur des « plantes guérisseuses » à breveter, Issaka, le chamane, gardien d’une forêt primaire exceptionnellement riche et Darnton, le botaniste anglais venu dans cette vallée reculée, répertorier les très convoitées variétés d’espèces ancestrales. Du Kenya, au Brésil en passant par Londres, ce thriller végétal foisonnant tient le lecteur en haleine.

Ces plantes qui nous font vivre

Brigitte Adès rappelle dans son livre combien il est vital de remettre les plantes au centre de nos existences. « C’est grâce à elles que nous sommes en vie. Souvent, nous passons à côté d’une masse verte sans réaliser ce que nous lui devons. Nous vivons en symbiose avec les végétaux. Notre survie est liée à celle des plantes. » L’auteure redit combien il est important de respecter la biodiversité et « cesser de raisonner en terme de lutte entre les espèces ». Pour cela, être moins avides, consommer moins, mieux, nous recentrer sur l’essentiel. Les grands laboratoires, dont le livre fait le procès, investissent certes, mais là où c’est lucratif et ne sont pas toujours dans la recherche la plus optimale, forcés bien souvent de faire des compromis dans la façon dont ils vont nous soigner.

« La volonté de puissance est l’ennemi de la symbiose ! »

Heureusement, il existe des solutions. Sur terre depuis 450 millions d’années, les plantes ont acquis des connaissances dont nous serions sages de nous inspirer. Elles ont plus d’un tour dans leur sac et vont pousser ailleurs. La terre peut se régénérer. Il faut replanter, mais les espèces utiles, en privilégiant la variété, et savoir partager entre pays pour s’entraider.

Brigitte Adès dit aimer écrire des livres joyeux et agréables à lire, même si ses sujets sont profonds et ses messages sérieux. Nouveau pari réussi ! Après cette lecture, vous ne porterez plus jamais le même regard sur les plantes…

Marie-Hélène Cossé

¹Les Voix de la forêt de Brigitte Adès (Portaparole France, septembre 2021). Prix de l’Académie française Ève Delacroix 2022.
²Les Exilés du paradis de Brigitte Adès (Portaparole France, 2017).

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