Il existe actuellement plus de 300 écomusées dans le monde dont au moins 200 sont en Europe, principalement en France, Italie, Espagne et Pologne. De leur côté, la Chine, l’Inde, le Brésil, le Canada ont développé de nombreux sites en lien avec les industries locales. Outils de conservation, les écomusées valorisent le patrimoine matériel et immatériel d’un territoire. Difficile de choisir…
Patrimoine et transmission
Alors au hasard de mes promenades de cet été, j’ai visité l’écomusée de l’Avesnois, un musée du textile et de la vie sociale, installé dans une ancienne filature¹ de 1863, un bâtiment en briques rouges surmonté d’une haute cheminée. Cette usine travaillait la laine peignée qui fit la renommée de Fourmies au 19ème siècle. Elle a conservé les machines de filature et de tissage représentatives de l’évolution des techniques, dans un secteur aux conditions naturelles favorables, forêts et étangs, pour des normes hygrométriques adaptées au filage des fils extrêmement fins.
« Les écomusées ont pour but de préserver ou de reconstituer dans les bâtiments d’origine des activités dont le passage du temps nous a coupés depuis un ou deux siècles. » Claude Lévi Strauss
Le textile et son histoire
Elle prend naissance à Fourmies au milieu du 18ème siècle avec le développement des fabriques de fil à dentelle. En 1774, naitra la première filature de lin retors et blanchis à la façon hollandaise, suivie au début du 19ème siècle par la création de fabriques de bonneterie de coton, grâce à l’installation de machines à vapeur, les « pompes à feu » venues d’Angleterre. Fourmies devient le centre mondial de production de la laine avec peu de machines, pas de techniciens, pas d’ingénieurs, un éloignement géographique et une ville dépourvue de routes et de voies navigables…, mais les hommes sont ingénieux, se tiennent en permanence au courant des progrès techniques et réussiront à maîtriser toute la chaîne de production de la laine du mouton jusqu’aux produits finis (peignage, teinturerie et tissage). En 1840, 6 usines sont en activité, 49 en 1866 et 76 en 1869. Notre guide a mis en route toutes les machines ensemble et, en fermant les yeux, j’ai facilement pu imaginer le quotidien de ces femmes et de ces hommes travaillant les pieds dans l’eau, dans un bruit assourdissant et une chaleur étouffante.
Le besoin de racines
L’écomusée évoque aussi la vie d’une époque : école primaire de 1895, ancien habitat familial ouvrier, estaminet et boutiques agencés dans une vieille rue pavée… « Je me souviens de ces pupitres en bois et des encriers », « Je vois encore ma mère acheter ses écheveaux de laine chez la mercière » ou « J’ai dans mon grenier la robe en dentelle de mon baptême, je vais la donner au musée, au moins elle sera préservée du temps qui passe ». Chacun se souvient et parle à voix haute. J’ai souri en les écoutant se faire l’avocat de leur jeunesse, j’ai été émue et même attendrie. « Je me rappelle être monté sur la barre de cuivre qui file le long du comptoir pour me grandir et voir ce qui se passait de l’autre côté du guichet de la poste. » Tout à coup, aujourd’hui se mêle à hier, une raison de plus pour se retourner sur son passé et visiter les écomusées qui relient les générations entre elles.
Vicky Sommet
¹Les filatures traditionnelles de laine ont laissé la place aux usines de textiles techniques et intelligents. Les débouchés sont nombreux dans les domaines de la santé, de l’aéronautique, du ferroviaire, du bâtiment ou des loisirs. On parle aussi de tissus susceptibles à terme de produire de l’électricité pour recharger batteries de téléphones, tablettes, ordinateurs…
Ecomusée de Fourmies (59) avec un Pass éco valable un an pour visiter quatre sites, une ancienne verrerie à Trélon, le Musée des Bois Jolis de Felleries pour découvrir la boissellerie (tournage sur bois) et la Maison du bocage de Sains-du-Nord. Ouvert du 1er mars au 30 novembre du mardi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h. Fermé le lundi. Le week-end et les jours fériés (sauf lundi) : de 14h30 à 18h30.