Un livre, « La beauté du ciel » de Sarah Biasini, sur le bandeau, Romy tenant dans ses bras une petite fille blonde qu’elle embrasse avec tendresse, une photo qui est une invitation à pénétrer dans l’intimité d’une mère disparue et de sa fille, devenue maman à son tour.
Une transmission difficile
Difficile en effet de raconter sa mère qui disparait alors que Sarah n’a que 4 ans et demi. Mais comme tous les enfants, elle a voulu savoir qui était cette mystérieuse maman et ce sont les autres seuls qui pouvaient combler cette absence en faisant revivre des images et effacer le fantôme qui hantait sa mémoire. Même si elle pense qu’« on n’arrête jamais d’être la fille de sa mère. On n’arrête jamais d’être l’enfant de ses parents, même quand on devient parent à son tour ». Et pourtant le prénom de Romy donné à des enfants l’a toujours blessée, comme si elle était dépossédée d’un bien très personnel. Sarah a décidé de vivre normalement, en oubliant l’actrice mais en s’attardant sur le manque et en imaginant quelles auraient été leurs conversations si elle était encore là.
La tendresse, un bien indispensable
« Je n’ai jamais eu de manque de ma mère parce que j’ai eu toute la tendresse, tout l’amour, tous les bras … ! ». Même si Sarah n’a ressenti l’absence qu’une fois femme elle-même, il lui manque aujourd’hui la relation entre deux femmes, la complicité pour rigoler ensemble, et c’est pourquoi, la quarantaine passée, elle s’est décidée à mettre des mots sur ses douleurs, sur sa réalité et s’autorise enfin à « aimer publiquement » en écrivant ce livre avec un titre qui fait référence à celle qui est au ciel et qui l’observe peut-être de là-haut. Difficile aussi de parler de cette mère célèbre dans le monde entier et que tout le monde a mieux connue que vous. Et de lui rendre hommage en décrivant dans son ouvrage une femme libre, normale et gaie, loin de tous les films, documentaires ou récits qui ont montré une actrice malade, dépressive, voire alcoolique.
Un devoir de fille
« J’ai un rapport très sain avec ma mère, je crois. Parfois je lui dis : tu m’emmerdes, tu m’agaces … je la démystifie ». Et pourtant c’est dur pour Sarah de se dire, j’étais dans ses bras, je l‘ai touchée, embrassée, mais je n’en ai pas de souvenirs. Aujourd’hui, après avoir longtemps repoussé cette mère très envahissante par son absence, elle a écrit une histoire qu’elle trouve romanesque. Une analyse plus tard, Sarah s’est sentie plus intelligente, moins angoissée, et plus à même d’améliorer son appréhension de la féminité. Et si elle rejette toujours Romy l’actrice de ses souvenirs, elle a pourtant donné comme second prénom à sa fille Anna, celui de Rosalie, l’un de ses plus grands rôles.
Ses rencontres avec Sautet, Delon, Piccoli, sur les traces de cette autre Romy, lui ont laissé l’image d’une femme, une pote, qui une fois démaquillée, n’était pas reconnue. « Ce détail m’a beaucoup plu. Car, pour moi, ma mère, c’est une femme lambda. »
Vicky Sommet
« La beauté du ciel » de Sarah Biasini aux éditions Stock (janvier 2021).