Six mois après sa disparition, sa beauté coupe toujours le souffle. La grâce de son travail nous inspire en souriant et nous convoque à la réflexion en expirant.
♦ Pionnière de la dérision sociale
De milieu social moyen, après des études moyennes, elle se passionne très jeune pour le dessin comme moyen. Corrosive et élégante, elle est la pionnière de la dérision sociale en BD. Encore la première à scruter les rapports de couple. Elle devance les médias sur la défense de la liberté sexuelle, de la PMA, de la GPA, de la contraception. Elle innove la parole des femmes « normales » en BD, en opposition aux archétypes.
♦ Drôle sur des sujets sérieux
Sa première fille, avant la familière Agrippine, se nomme Cellulite : moche et méchante, parait-il, mais si touchante. Les personnages féminins sont croqués avec leurs tics, leurs envies et leurs désillusions.Tout est drôle, voire très drôle, et cependant les sujets sont sérieux. Ses thèmes récurrents sont donc la difficile condition de la femme, les grincements dans les couples, le machisme ambiant et les paradoxes « gauches » des intellos.
♦ Aventurière des temps modernes
Bretécher est une aventurière des temps modernes, libre, en dehors du schéma « enfants, famille, mari », elle a travaillé d’arrache-pied pour s’imposer dans un monde masculin. Son travail personnel, dans un langage propre, brosse une comédie sociale sans mépris, tout en traits virtuoses.
Roland Barthes a dit d’elle : « Meilleur (!) sociologue de l’année ».
♦ Une carrière couronnée
Elle sera couronnée « Reine du 9ème art ». Elle reçoit le grand prix d’Angoulême en 1982. Et Beaubourg lui consacre une exposition sur 50 ans de carrière en 2015. Libre et talentueuse multi-terrains, elle s’auto-édite aussi. Le Nouvel Observateur la rend célèbre par la colonne des Frustrés, parue pendant plusieurs années.
Rendue inoubliable en beauté, en charisme, en sincérité et en insolence, elle ne rentre dans aucune case, sauf… essentielle. Merci, merci encore, Claire.
Doc Eugénie
Recommandé : le hors-série du Nouvel Obs et les 8 albums d’Agrippine.
