L’économie est venue par hasard car les maths ne la branchaient pas et elle a transformé l’étude des maths appliquées en sciences sociales. C’est le parcours d’études d’Isabelle Méjean qui, aujourd’hui, est professeure à l’école Polytechnique et vient de recevoir le prix du Meilleur jeune économiste 2020.
Son sujet : l’Europe
« Ce qui m’a plu, c’est la manière dont on aborde l’économie avec les statistiques et les données et je me suis tournée vers l’économie internationale parce que je trouvais que c’étaient des questions très importantes dans les années 2000 avec le début de la monnaie unique. Cette zone Euro nous concernait directement et notre intégration dans l’Europe méritait d’être étudiée. » 60% des échanges commerciaux de la France se font en Europe où les pays présentaient une unité monétaire et une unité budgétaire, mais la monnaie unique a tout modifié. Le commerce intra-européen est florissant mais la disparition du taux de change l’affecte beaucoup. Le manque de compétitivité de la France est réel par rapport à ses partenaires, surtout l’Allemagne parce que la monnaie ne peut plus être ajustée.
Inventer l’économie de demain
« Pas de solution miracle, il va falloir trouver ou inventer de nouveaux outils de politique économique comme la relocalisation qui se fait sous forme de subvention mais pour cibler qui et quoi ? ». Question qui s’est posée pour la fabrication de masques, de blouses ou de réactifs pour les tests, et comment échapper à l’emprise asiatique, et comment redonner du travail en France et booster la production française ! D’où le plan de relance pour la santé, l’agro-alimentaire, l’électronique avec un milliard d’Euros sur la table car nous sommes très dépendants à ce jour et la souveraineté nationale est en cause.
Les étudiants d’aujourd’hui
« Ce qui est intéressant, c’est que les étudiants de Polytechnique, à part leurs capacités importantes, ne se sont pas souvent interrogés sur leur avenir. L’économie leur est étrangère, bien qu’ils se posent des questions sur le fonctionnement de la société, ils sont assez naïfs mais curieux et savent qu’ils savent peu de chose dans ce domaine. D’où l’intérêt pour moi de leur faire cours ». Très exigeants, ils sont aussi très demandeurs ! Avec le Covid, chacun enfermé dans sa chambre d’étudiant à Saclay, Isabelle a inversé sa pédagogie : chacun lisait les polycopiés avant le cours et après on discutait dans les amphis pour répondre aux questions. « C’était super parce qu’on parlait de l’épidémie, de la crise, de l’économie. Au lieu de regarder Netflix toute la journée, ils ont cherché de l’information et sont venus en cours pour apprendre, heureux d’avoir approché la science économique. »
Lauréate du Prix du Meilleur jeune économiste 2020, Isabelle Méjean a vu croître son exposition dans le monde scientifique mais comme tous les chercheurs, elle travaille dans l’ombre, sur la durée, même si sa maman, en lisant la presse, lui a avoué avoir enfin compris son travail. Comme chacun qui devrait se sentir concerné aujourd’hui … et peut-être encore plus demain !
Vicky Sommet