Avec ses patients d’abord puis dans un laboratoire, Patrizia Paterlini-Bréchot a déployé toute son énergie pour comprendre le parcours des cellules tumorales dans le corps humain. Et demain, une simple prise de sang permettra de détecter les prémisses d’un cancer. Plus qu’une aventure, une profession de foi !
Une femme de combat. J’ai rencontré Patrizia, un professeur de médecine qui a décidé de mener une guerre sans merci contre le cancer. À la voir, menue et souriante, mais décidée et très volubile lorsqu’il s’agit de parler de son projet, on ne peut que tomber sous le charme de cette italo-française qui croit que le travail qu’elle a entrepris avec son équipe, essentiellement féminine, et avec l’aide d’autres laboratoires scientifiques à travers le monde, ne peut qu’aboutir. Car, elle en est persuadée, c’est sur le diagnostic précoce que les efforts de tous ces chercheurs doivent se concentrer. Après des études dans un lycée d’un petit bourg d’Émilie Romagne, elle rejoint la faculté de médecine, prête à s’engager dans une carrière incertaine puisqu’elle n’est pas issue du sérail. Jeune docteur, elle croise un patient atteint d’un cancer du pancréas et se retrouve désemparée devant la souffrance. « Les malades savent toujours la vérité mais la plupart s’appliquent à l’ignorer ». Dire la vérité, la cacher ou l’édulcorer face à une mort imminente, les médecins n’ont pas toujours les mots adéquats.
Le cancer n’a pas d’âge. « Le cancer n’est pas une maladie récente, un effet secondaire de la modernité causé par la pollution, l’alimentation ou la vie sédentaire ». En effet, les chercheurs ont découvert l’existence de tumeurs sur une momie égyptienne et c’est Hippocrate, 400 ans avant JC, qui les baptisa « carcinos » en grec, puis Galien qui leur donna le nom de « oncos » à Rome. L’origine du mal a été attribué à un excès de « bile noire » jusqu’à la Renaissance. Et il faudra Pierre et Marie Curie qui mirent au point le radium et la radiothérapie, puis Gustave Roussy, qui créa un Institut de recherche sur le cancer, pour que la science se penche sur cette maladie jugée jusque-là incurable.
Le Sherlock Holmes de l’ADN. Pour elle, le cancer n’est qu’une prolifération cellulaire incontrôlée. Il faut donc se substituer au virus tumogène pour prendre le contrôle en insérant son propre génome dans l’ADN de la cellule.
« Personne n’avait encore exploité cette connaissance. Mais comme il y a des milliards de cellules, il était quasiment impossible d’en empêcher une seule de se multiplier ! Avec mes collègues, et sans l’aide de l’industrie pour ne pas subir de pressions extérieures, nous avons publié et usé toutes nos forces pour avancer dans notre lutte contre la maladie. Jusqu’à ce qu’un test ait enfin vu le jour, pour que demain, chacun d’entre nous puisse au moyen d’une prise de sang, découvrir la cellule nocive ».
Reste encore à détecter l’organe atteint pour arrêter le cancer de proliférer et permettre une opération. « Les études continuent, le test est déjà disponible mais il nous faut encore trouver de l’argent pour développer nos recherches et faire baisser la mortalité due aux cancers ».
Vicky Sommet
Tuer le cancer – Pr. Patrizia Paterlini-Bréchot (Éditions Stock, Prix Essai France-TV 2017)