Attirée depuis sa plus tendre enfance par cet animal mal aimé, Virginie Boyaval a fini par lui consacrer sa vie. Elle protège, observe et défend becs et ongles la cause du blaireau face à l’hostilité et la cruauté dont il est très injustement victime. Bête noire des agriculteurs et des chasseurs, Virginie est plus que jamais déterminée à faire évoluer son statut.
La rencontre avec le blaireau
L’attirance de Virginie pour cet animal date de la petite enfance. Un déménagement à l’âge de 12 ans la rapproche de la forêt de Compiègne qu’elle explore inlassablement et ce nouvel environnement la familiarise avec le blaireau. Elle découvre les terriers, participe à des enquêtes, effectue des observations, comprend le mode de vie du blaireau ainsi que les relations qu’il entretient avec les autres membres de son clan. Elle mesure combien ce petit animal est victime d’une persécution importante, établie, voire même assumée, sur tout le territoire. Alors qu’en Angleterre l’espèce est protégée, qu’il existe des campagnes de vaccination et que les agriculteurs sont indemnisés des dégâts éventuels, en France le blaireau est toujours victime d’une mauvaise image. Celle-ci est due à son mode de vie nocturne et aux dégâts parfois occasionnés dans les cultures. Le blaireau est devenu la proie des adeptes de la vènerie sous terre, jeu cruel qui consiste à repérer les terriers, creuser à la pelle et y exterminer toutes les petites familles de blaireaux y compris les femelles et leurs bébés, les sadiques allant jusqu’à laisser un petit en vie près de ses parents morts. Ce sont de véritables concours qui ont lieu à travers le pays.
Le changement de vie
Alors qu’elle travaille encore en entreprise, Virginie aperçoit un blaireau blessé sur la route. Elle réussit à lui sauver la vie et cette rencontre va faire basculer la sienne. Elle décide de quitter son travail et de se consacrer à sa passion. Elle monte l’association MELES (le nom scientifique du blaireau) et sa vie va se partager entre les conférences dans les écoles ainsi qu’auprès de tout grand public et le centre de soins pour les blaireaux. Elle y soigne les mammifères sauvages comme le hérisson. Elle ne bénéficie d’aucune subvention, ses revenus proviennent de ses conférences, ses publications, des livres, des films et des adhésions à MELES. Depuis 2015, Virginie Boyaval va à la rencontre des enfants malades dans les hôpitaux en leur racontant son histoire, sa vie avec les blaireaux, son suivi, les soins, ses heures d’observations avec la présentation de leur mode de vie, leur comportement, tout ceci agrémenté d’images touchantes et drôles de ces petits « ours » noirs et blancs. Ces blaireautins orphelins très souvent blessés ou malades retrouvent, après plusieurs mois de soins et d’apprentissage, la liberté dans la nature sauvage.
Deux points de vue
L’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) a publié le 30 mars 2022 une pétition officielle, adressée au Sénat. L’objectif, protéger les blaireaux en interdisant la vénerie sous terre, une pratique de chasse traditionnelle, considérée comme cruelle par ses opposants. Le chiffre de 100 000 signatures requises pour que les sénateurs s’en saisissent a été atteint et les défenseurs espèrent une interdiction totale du déterrage de ces animaux vivants. Alors que le président du groupe écologiste du Sénat, affirme que cette chasse est « un mode de chasse cruel qui relève d’une pratique d’un autre temps », le sénateur président du groupe d’études chasse et pêche répond « Le blaireau n’est pas une espèce en voie de disparition. Elle a sa place dans la nature mais doit faire l’objet d’une régulation ; elle est la cause de dommages dans les vignes, creusent des galeries sous les voies ferrées et est un facteur de la transmission de la tuberculose bovine. » Les deux points de vue s’affrontent en renouvelant toujours les mêmes arguments…
Tout ceci n’entame pas la détermination de Virginie qui continue à œuvrer avec courage pour la protection, le soin et le respect de ses amis sauvages.
Brigitte Leprince