Mais pourquoi l’arobase @ remis au goût du jour en 1971¹ a-t-il toujours existé sur les claviers alors que presque personne ne l’utilisait auparavant ? On en trouve déjà des traces au Moyen-Âge. Il s’agirait d’un phénomène lié à la mécanique de l’écriture à la plume. On écrit d’un seul trait et on finit par encercler le « a ». On le retrouve également un peu plus tard dans les écritures commerciales d’Europe du sud, car l’Arroba est une ancienne unité de mesure de contenance et de poids espagnole directement dérivée de l’arabe al-rub ( le quart). Une mesure abandonnée avec le monopole du système métrique, mais qui a voyagé jusqu’aux pays anglo-saxons dans les claviers des machines à écrire ou les claviers d’ordinateurs pour signaler un taux d’intérêt ou le prix unitaire d’un article. Mais le signe a maintenant une vie parallèle ! La forme de l’@ lui vaut des appellations aussi fantaisistes qu’évocatrices. De l’escargot en français au strudel israélien à l’apestaart (queue de singe) hollandais, en passant par le snabel (trompe d’éléphant), le kanelbulle (bâton de cannelle) suédois ou le chiocciola italien sa connotation est toujours positive. Il paraît que Ray Tomlison, son créateur, aurait dit en montrant son invention à un collègue : « N’en parle à personne. Nous ne sommes pas censés travailler là-dessus ! »
Anne-Marie Chust
¹À l’origine, Ray Tomlison, ingénieur qui collabore en 1971 à la conception pour le gouvernement américain du réseau Arpanet, a l’idée d’associer deux programmes pour envoyer des messages à un utilisateur connecté sur un autre ordinateur et s’envoie le tout premier courrier électronique. Afin de définir l’adresse d’envoi, il aura besoin de séparer dans celle-ci la partie indiquant l’utilisateur de celle indiquant l’ordinateur sur lequel se trouve la boîte de réception. L’arobase (@), qui n’est utilisé dans aucun nom propre ou commun, est idéal pour jouer le rôle de séparateur, d’autant qu’elle se prononce at (« chez » ou « vers ») en anglais.
