Serait-ce le mot d’une époque et d’une génération ? Ou bien tout serait-il vraiment devenu toxique ? Le patron, le job, les amis, la famille, les relations, le monde… Sacré « mot de l’année » en 2018, « toxique » s’impose aujourd’hui dans nos discours et apparait comme le nouveau malaise du XXIe siècle. Depuis sa naissance à l’ère de la mythologie grecque où on parle de flèche empoisonnée, en passant par le XIXe siècle où il fait référence aux stupéfiants, puis au XXe siècle aux substances chimiques toxiques, il recouvre aujourd’hui un usage beaucoup plus large, notamment depuis la vague #MeToo et la pandémie qui ont donné une place à la fragilité et à ce qu’on peut supporter en tant que vivant. Tout n’est-il pas jugé cependant un peu vite comme toxique ? Où se trouve la vraie toxicité ? Ne commet-on pas tous des erreurs sans pour autant devenir toxiques ? Et ce qui l’est pour moi l’est-il pour les autres ? Alors, comment entrer en « détox de toxicité » ? Si dire toxique c’est dire que c’est trop, l’antidote pourrait consister alors, comme le dit Clotilde Leguil¹, « à sortir de l’excès et à réguler ». Nos comportements, nos rapports aux autres, notre regard et notre rapport à la planète puisque, si une chose est sûre et certaine aujourd’hui, et c’est la grande leçon des dérèglements climatiques, si l’Homme est bien toxique à quelque chose, c’est à la planète…
Marie-Hélène Cossé
¹Philosophe & psychanalyste, auteure du livre L’ère du toxique – Essai sur le nouveau malaise dans la civilisation de paru aux PUF (septembre 2023).