Inviter petits et grands à retrouver le goût de la poésie, à célébrer la fraternité qui nous unit avec les animaux, domestiques ou sauvages, du plus gentil à celui qui nous effraie, comme les vipères, en les comprenant de l’intérieur, c’est ce que propose Terre des bêtes, merveilleux ouvrage qui mêle trois auteurs et trois styles dont l’inspiration des récits, pastorales et fables vient de l’amour de la nature et des savoirs des anciens de Haute-Corrèze. Ma préférence va aux fables, qui toutes ont pour héros des animaux, dont l’espièglerie, la finesse de pensée et la sagesse sont à savourer une à une, à haute voix et à mettre au programme scolaire dès la rentrée ! Difficile de choisir entre le garenne qui étourdit le chasseur, en le faisant tourner en bourrique, et conclut : « Courir tout droit ne s’avère pas toujours le plus adroit, Tourner en rond avance parfois plus qu’on ne le croit. » Ou le chat qui revendique avec raison d’être « un professeur de joie de vivre » et le merveilleux dialogue entre l’octogénaire et l’hirondelle :
Elle livra donc l’un des plus précieux secrets à la vieille dame,
Dans l’espoir de lui remettre ensemble le corps, le cœur et l’âme :
« Aussi court soit-il, tu as encore un avenir,
Où nul sait s’il ne cache pas deux paroles, un sourire,
Un rayon de soleil sur un tapis de pervenches,
Le succès d’un descendant, une improbable revanche,
Encore la féérie d’un champ de seigle qui ondule,
Encore l’émerveillement d’entendre un oiseau qui tridule,
Qui te combleront de moments de vrai bonheur,
Égalant ceux que tu as vécus aux temps de ta splendeur :
Même si tes plus belles années se sont envolées pour toujours
Tu as peut-être à vivre les plus beaux de tes jours ».
Anne-Claire Gagnon
Terre des bêtes de Bernard et Jean Bernaben, Jean-Pierre Marguénaud (Éditions L’Âge d’homme, février 2022) : 48 fables, 18 récits et 16 pastorales sur le respect des animaux et de la nature.