Peut-on inventer une sexualité qui soit la nôtre et pas celles que les normes, l’histoire, la publicité, le cinéma, les romans nous imposent, parfois à l’insu de notre plein gré ? C’est le pari que fait Laura Berlingo, gynécologue, dans son ouvrage « Une sexualité à soi ».
S’écouter sans céder
Et comme elle l’écrit en préambule : « Nous sommes tous et toutes concerné.es, à tout âge. La sexualité n’a rien d’inné. C’est quelque chose qui, comme le fait de marcher ou de lire, s’apprend. Ça s’apprend et se désapprend, se déconstruit pour mieux se reconstruire, tout au long de la vie. » Les cours d’éducation sexuelle mis en place depuis 1973 ont-ils d’ailleurs enseigné l’essentiel ? Le respect de soi, de l’autre, la poésie des relations amoureuses, plutôt que la physiologie de la seule fonction reproductive ? Pas certain et ceci explique pourquoi en 2021 parler de sexualité n’est toujours pas un sujet comme les autres. « Penser sa sexualité, c’est aussi accepter que le sexe n’est ni nécessaire ni suffisant à une vie heureuse, épanouie, qui a du sens pour nous. »
L’OMS recommande une « approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles qui soient sources de plaisir et sans risque, libres de toute coercition, discrimination ou violence ».
Consentir ensemble avec enthousiasme
Il est temps que la vie sexuelle ne soit plus binaire, actif/passive, dominant/dominée, pénétrant/pénétrée (quelle vision réductrice, par le petit bout de la lorgnette !). Laura Berlingo appelle à « passer d’une politique du consentement à une éthique du désir », pour vivre la sexualité sur un pied d’égalité, femmes et hommes. Même si physiologiquement, on est loin de l’égalité : « les femmes peuvent être multi-orgasmiques et jouir plusieurs fois de suite, les hommes ont ce qu’on appelle une « période réfractaire ». Ceci expliquant en partie le faible taux d’orgasmes simultanés, 22%. Laura Berlingo propose une sexualité sans injonction, affranchie des clichés et des rapports de domination. Avec cette proposition audacieuse « d’accepter, hommes et femmes, que l’érection soit aléatoire. » Parlons comme elle sans tabou, notamment à nos gynécos qui se cantonnent trop dans un contrôle technique sans s’intéresser vraiment à notre santé sexuelle – laquelle d’entre nous a été interrogée sur la qualité de sa cyprine, essentielle pourtant ? Et pas que pour faire un 50 au Scrabble !
Partagez le livre « Une sexualité à soi », à la fois technique et militant dans le sens meilleur sens du terme, écrit par une gynécologue qui suggère de faire de la sexualité un espace de liberté, d’égalité et d’épanouissement, dans le respect de soi et de l’autre. Un beau programme d’évolution sexuelle !
Anne-Claire Gagnon
« Une sexualité à soi » de Laura Berlingo (éditions Les Arènes, 2020).
Signalons les podcasts de Laura Berlingo, « Qui m’a filé la chlamydia ? » et « Coucou le Q », talk sexo pour les ados, et la toute nouvelle appli de Chloé Macintosh, Karma, qui souhaite « faire du plus grand tabou culturel une conversation sociale ».
