Giulia Enders nous invite dans son livre récent* à une digestion réussie en proposant de changer de comportement alimentaire et d’appliquer quelques règles très concrètes dont certaines sont résumées pour vous ci-dessous :
Allergies, sensibilités et intolérances. Ceux qu’on tient pour responsables, les aliments à base de blé, lait ou fructose, contiennent par ailleurs des substances extrêmement utiles. La jeune médecin propose de revoir les quantités ingérées plutôt que de s’en priver totalement. En effet, il semblerait que la plupart des personnes concernées par une intolérance alimentaire ne présentent pas d’allergie génétique complète, mais réagissent seulement à un excès. Nous avons tous assez d’enzymes, par exemple, pour pouvoir savourer un peu de sauce à la crème, un morceau de pain blanc ou une salade de fruits !
Nos bactéries. Il faut savoir que la majeure partie de notre système immunitaire est localisée dans notre intestin (80%) et que les bactéries constituent 90% de notre population intestinale et délivrent des informations sur notre identité (âge, bien en chair ou mince, fan de sushis ou pas…) et sur nos compétences. L’auteur nous conseille la plus grande prudence en matière de conseils nutritionnels : ce qui est bon pour l’un, ne l’est pas forcément pour l’autre ! L’idée que les bactéries intestinales puissent influer sur l’ensemble de notre métabolisme et ainsi réguler notre poids est récente. On parle par exemple pour certains individus de trop de bactéries « patapouffantes » dans la flore intestinale (elles tirent plus de substance de la nourriture).
Les parasites. Dans la plupart des cas, une viande bien cuite n’est pas à l’origine d’une salmonellose. En revanche quand on décongèle son poulet en le laissant dans l’évier ou dans l’essoreuse à salade, les bactéries qui supportent très bien la congélation et la décongélation vont aller s’installer… sur la salade qui est dans l’évier et nous rendre malades si elles sont en quantités suffisantes. Si vous n’êtes pas fan de gastro, quelques conseils à suivre ici :
- les bactéries aiment les planches en bois, moins celles en plastique ;
- tout ce qui a été en contact avec la viande crue ou la coquille des oeufs doit être soigneusement lavé à l’eau chaude ;
- dans la mesure du possible, bien faire chauffer la viande et les plats à base d’oeufs (il est recommandé d’acheter des oeufs frais de bonne qualité et de toujours les stocker à une température inférieure à 10°).
La propreté n’est pas toujours ce que nous croyons qu’elle est. Plus les standards d’hygiène sont élevés dans un pays, plus il y a d’allergies et de maladies auto-immunes. Il y a trente ans une personne sur dix était allergique, aujourd’hui une sur trois… La propreté est donc un équilibre sain entre une quantité suffisante de bonnes bactéries et une petite dose de mauvaises bactéries. Nous utilisons trop de produits ménagers désinfectants, pour contenir les bactéries, il suffit de :
- diluer (diluées elles ne nuisent plus),
- sécher (elles ne se reproduisent pas sur surface sèche),
- régler le thermostat (le froid joue un rôle important pour les supprimer, ne pas dépasser 5° dans nos frigidaires, laver le linge à 40° suffit la plupart du temps),
- nettoyer (attention se laver trop souvent n’a pas de sens que ce soit pour les mains et le corps, car en éliminant trop souvent le film graisseux qui nous protège on expose notre peau aux agressions extérieures).
Les probiotiques. Il ne faut pas hésiter à consommer ceux qui aident l’intestin à retrouver son équilibre lorsqu’il en a besoin (après un traitement d’antibiotiques par exemple dont le bon et le mauvais usages sont rappelés par l’auteur dans son ouvrage). Ils fonctionnent comme une cure de soins. Quand on cesse de les prendre, la flore intestinale doit se remettre à assurer. Bonne nouvelle, ils ne sont pas seulement contenus dans les yaourts et les laboratoires s’y intéressent. Mauvaise nouvelle, aucune préparation n’étant garantie efficace à 100%, il faut expérimenter jusqu’à trouver celle qui améliore la situation… On suit le traitement pendant quatre semaines et sans amélioration, on passe à autre chose.
Les prébiotiques. Bien souvent notre alimentation en manque, ainsi que de fibres (la plupart des Européens ne consomme que la moitié des 30 grammes de fibres alimentaires recommandées par jour). Or, nous avons tous un plat prébiotique préféré que nous pourrions manger plus souvent (au choix : artichaut, asperge, endive, banane verte, topinambour, ail, oignon, panais, salsifis, blé complet, seigle, avoine, poireau). Quand on se nourrit principalement de produits pauvres en fibres (pâtes, pain blanc, ou pizza), il faut augmenter les fibres progressivement, mais sans exagérer pour éviter, nous dit la jeune doctorante allemande, « le grand festival du prout pour le moins inconfortable »…
Que retenir en résumé de cet ouvrage très complet et richement illustré ? Arrêtons de négliger, voire maltraiter, celui qu’on dit essentiel à notre bonne forme et notre bonne humeur et qui peut améliorer notre quotidien. Passons de : « l’intestin, ça craint » à « l’intestin, c’est le fin du fin » !
Marie-Hélène Cossé
*Le charme discret de l’intestin, Giulia Enders, Éditions Actes Sud, avril 2015.
Lire Tout se joue dans l’intestin (1ère partie) publié le 21 mai 2015.