Apprivoiser le temps

0

Qui a inventé le temps, les horloges, le temps volé, le temps compté ? Celui qu’il faut prendre avant qu’il ne vous prenne ? Voilà quelques unes des interrogations soulevées lors de la Journée d’Émergences consacrée au temps à Bruxelles le 14 octobre dernier en présence, entre autres, de Florence Aubenas, Matthieu Ricard et Christophe Fauré.

Se libérer du temps

Les enfants vivent naturellement dans le présent, le meilleur moyen d’accéder à l’éternité, libérés du passé sans les attentes du futur. C’est ce qui fait la fraîcheur de l’esprit d’enfance, avec un présent toujours neuf, sans âge. Tant qu’on n’a ni montre ni Smartphone, le temps est une notion très relative. Car le temps n’est finalement qu’une pensée, une idée. Sans la conscience que nous en avons, il n’existe pas. Le temps ne s’écoule pas, c’est nous qui nous écoulons dans l’espace-temps. Ce qui en fait le père de tous les problèmes, donc une vraie source pour les philosophes ! Comme le disait déjà à l’époque Sénèque :

« Ce n’est pas qu’on ait peu de temps, c’est qu’on le gaspille beaucoup. »

Passage en dehors du temps

Le 5 janvier 2005, la vie de Florence Aubenas est passée du mode débordée permanente à celui d’otage, enchaînée dans le noir, avec un temps fou devant elle, « Le temps était ma bouée. », et elle s’est inventée un monde imaginaire où elle était à nouveau débordée, prenant un grand plaisir, à la fin de chaque intervention que ses preneurs d’otages lui imposaient, de donner la date et l’heure. Depuis, elle a remis son horloge intérieure à l’heure, celle de prendre vraiment son temps, même si son métier de journaliste est souvent celui de l’immédiateté.

En quête d’amour et de paix

Christophe Fauré a vécu de nombreuses vies, tour à tour psychiatre, moine, et puis à nouveau psychiatre et psychothérapeute en unité de soins palliatifs. Pour celles et ceux qu’il côtoie, quand le temps est compté, le plus dur c’est de faire le triste constat du temps perdu, des regrets des rêves inaccomplis. Et pour certains, comme cette femme, c’est la sensation inattendue, alors que le corps part à vau-l’eau, qu’elle a perdu son métier, que la maladie lui a tout pris, que la paix est là et qu’elle va vraiment bien. Cette paix, c’est le graal qu’on cherche toutes et tous, pas seulement comme cadeau en fin de vie, et qui se trouve tout simplement dans notre cœur, pour autant qu’on ait l’intention d’offrir cette paix intérieure aux autres.

La sagesse de la fin de vie c’est de pouvoir répondre pleinement et joyeusement, sans regret, à ces deux questions : Comment ai-je aimé ? Qu’ai-je appris ?

Quand nos vies ont été remplies d’amour, de sagesse et de connaissance partagées, alors cette paix irradie, devient contagieuse, comme celle ressentie lors de méditation, ouvrant la porte à la sérénité et même à la félicité. Une des raisons pour lesquelles, même quand le temps est compté, on peut être rayonnant d’amour !

Anne-Claire Gagnon
Mid&Flandres

Maintenant ou jamais ! La Transition du Milieu de la Vie (2011) et S’aimer enfin ! (Albin Michel 2018) de Christophe Fauré. 
Le Quai de Ouistreham de Florence Aubenas (Éditions de l’Olivier, 2010).

L'article vous a plu ? Partagez le :

Les commentaires sont fermés.