Quelle femme, il y a 40 ans, ne craignait pas pour sa vie ou pour son corps, lors d’une décision d’interruption de grossesse ? Les temps ont évolué grâce à la ténacité d’une femme, Simone Veil, qui a fait voter cette loi de l’avortement libre encadré médicalement.
Un film
Au-delà des divergences politiques, arrêter ce fléau de santé publique : « Sept femmes meurent par jour de l’avortement clandestin » fut l’argument force de la Ministre de la Santé. Maintenant, pour avorter, les femmes peuvent prendre des médicaments et rentrer à la maison sous suivi médical. Christian Faure, réalisateur du film La Loi, le combat d’une femme pour toutes les femmes¹, a confié à Emmanuelle Devos le rôle de Simone Veil. Le jeu est si juste que les images du passé se fondent dans la fiction. Le film se déroule les quatre jours précédant le vote : à l’Assemblée Nationale, dans des rencontres institutionnelles, auprès des instances religieuses et dans le foyer de Madame la Ministre. Quel thriller ça a été ! Alors, encore merci Madame Veil de nous avoir protégées.
Rappel historique
L’interdiction d’avorter en France faisait partir certaines femmes vers l’Angleterre, la Hollande ou d’autres pays avec un accueil de type militant. Une technique d’aspiration à la chaîne les attendait, dans un milieu médicalisé. Mais on ne proposait ni anesthésie ni suivi post-opératoire. D’autres cassaient leur tirelire pour trouver « une faiseuse d’ange ». Il est facile d’imaginer les suites et complications dont les plus fréquentes étaient fièvre, douleurs et hémorragie. Ces femmes demandaient alors une hospitalisation sous d’autres motifs. On pouvait les « parquer », pour ne pas dire jeter, au milieu de salles communes, sur des brancards, humiliées, insultées. Elles occupaient la place des jeunes filles punies dans les orphelinats ! Tous ces témoignages ne sortent pas d’un roman de Balzac. Donc la peur au ventre, avec un budget à grever et la prise de risques vitaux, de très nombreuses femmes ont vécu une expérience de survie avant le vote de la Loi Veil de novembre 1974.
Quarante ans après
220.000 femmes y ont recours chaque année, deux tiers des femmes à la suite d’un échec de contraception, une femme sur cinq, mais on n’en meurt plus. C’est donc toujours un sujet de santé public, pris en charge par la sécurité sociale. Seul l’âge a varié (les femmes sont plus jeunes) et l’acte est désormais possible depuis 1994 au cabinet médical, avec des médicaments et un accompagnement à domicile, qui satisfait les femmes et les couples. Mais pourtant la démarche ressemble toujours à un parcours du combattant et à un droit concédé plutôt qu’à un droit légitime. En dix ans, 130 centres IVG ont fermé. Les délais d’attente sont rallongés dans certaines régions qui sont plus favorisées que d’autres (la région parisienne en fait partie) et l’accueil est loin d’être serein… Le Ministère des Droits des Femmes a lancé en septembre 2013 un site d’information afin de combattre des sites en apparence dédiés à l’IVG distillant des fausses informations.
Doc Eugénie
¹Téléfilm événement sur la Loi Veil diffusé mercredi 26 novembre 2014 à 20h50 sur France 2. DVD sorti en 2015 (Amazon €14,99).