La rédaction de Mid&Plus vous dévoile ses fims « chouchous » de l’année écoulée, ceux qui l’ont étonnée, révoltée parfois, fait frémir, vibrer, ou pleurer aussi parfois. Et vous, quel est a été le vôtre ?
♦ « Decision to leave » de Park Chan-Wook (1h38)
par Vicky Sommet
Un détective chevronné enquête sur la mort suspecte d’un homme. Ses soupçons se portent sur la femme du défunt mais il sera déstabilisé par son attirance pour elle. Les membres des forces de police doivent savoir prendre une distance émotionnelle avec les personnes mises en cause. Affaire classée ou poursuite de l’enquête, notre policier ne peut s’empêcher de continuer sa surveillance par respect pour son métier et pour cette inclinaison naissante qu’il s’efforce de rejeter, surtout lorsque son second mari meurt lui aussi dans des circonstances indéfinies. Le doute et l’amour sont des sentiments que les acteurs expriment merveilleusement et le spectateur est tenu en haleine jusqu’à la fin, est-elle coupable ou pas ? Avec des mouvements de caméra originaux et des images ouatées, chaque séquence du film témoigne des émotions qui envahissent les deux protagonistes. Ce film a reçu le Prix 2022 de la mise en scène à Cannes.
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♦ « Chronique d’une liaison passagère » d’Emmanuel Mouret (1h40)
par Marie-Hélène Cossé
C’est un film que j’ai choisi, comme on dit, « sur l’affiche ». La distribution d’abord : Sandrine Kiberlain dont l’humour et l’allure dégingandée me ravissent, Vincent Macaigne dont le côté oiseau tombé du nid m’attendrit. Mais aussi le nom évocateur du film reposant sur le bleu profond de l’affiche. Et j’ai été comblée ! Charlotte, mère célibataire entreprenante, choisit de draguer Simon, marié, empêtré, affolé par cette blonde entreprenante qui lui propose de prendre du plaisir sans sentiments. « Ça va vite, là » dit-il ! Et oui, tout va vite dans ce film réjouissant à la Woody Allen où le sexe tient une place importante (mais pas à l’image), ainsi que les regards, les mots, ceux qu’on ne dit pas et ceux qu’on rate. La caméra glisse avec humour, mais aussi pudeur et émotion, sur ces deux personnages que tout sépare et qui vont, bien évidemment, se laisser piéger par leurs sentiments (mais peut-on vivre à moitié ?). Une petite histoire qui, somme toute, en devient une grande. Et surtout une comédie qui fait du bien et en 2022, voire en 2023, ça compte !
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♦ « Armageddon Time » de James Gray (1h55)
par Christine Fleurot
Comment devient-on un Mensch quand on est ado sous les années Reagan dans le très cosmopolite Queens ? Paul, fils d’une famille moyenne juive ashkénaze, rêve de devenir artiste-peintre tout en faisant les quatre cents coups flanqué de son ami afro-américain Johnny qui, lui, a la tête dans les étoiles. Une fumette dans les toilettes du collège mettra fin à cette amitié. Le jeune Paul se décillant découvre alors l’inégalité des chances, le racisme, la faille abyssale entre école privée et publique, la fracture sociale. Subtilement coaché par son grand-père (magistral Anthony Hopkins) – « Ne cède jamais rien aux salopards » – se dessine l’esquisse des traits du futur adulte qu’il deviendra. Un émouvant film d’apprentissage, où comme son titre le suggère, fin du rêve américain et fin des rêves d’enfance cheminent de conserve. Crépuscule d’un monde sublimé par un travail de lumière somptueux, un casting au cordeau (Anne Hathaway) et une BO parfaitement ajustée (The Clash, The Sugarhill Gang…).
Encore présent en salles. Publié en Blu‑Ray et DVD le 16 mars par Universal.
♦ « En corps » de Cédric Klapish (1h32)
par Brigitte Leprince
Voir et revoir « En corps » et encore ! Cédric Klapish nous entraîne avec rigueur et réalisme dans l’univers de la danse. Marion Barbeau, première danseuse de l’Opéra de Paris, joue le rôle d’Élise. Celle-ci se blesse lors d’une représentation et sa vie bascule lorsqu’elle apprend qu’elle ne pourra plus danser. Sa reconstruction passera par sa rencontre avec la danse contemporaine grâce à Hofesh Shechter et sa troupe. La musique, l’interprétation, le rythme, tout est au rendez-vous pour un moment d’enchantement.
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♦ « As bestas » de Rodrigo Sorogoyen (2h17)
par Anne-Marie Chust
Antoine et Olga, un couple de Français, interprétés par Marina Foïs et Denis Ménochet, sont installés depuis quelque temps dans un petit village de Galice en Espagne. Ils ont une ferme et restaurent des maisons abandonnées pour faciliter le repeuplement. Tout devrait être idyllique dans ce monde écologiquement correct, mais un grave conflit (une histoire d’éoliennes) les oppose à leurs voisins, deux frères « bruts de décoffrage », joués par Luis Zahera et Diego Anido, et la tension monte jusqu’à l’irréparable… Dans une œuvre naturaliste et envoûtante d’un réalisateur à son sommet, une imbrication de thèmes et de genres autopsiant les maux qui rongent une Espagne coupée en deux (mais ça pourrait être ailleurs), entre ville et campagne, et plus qu’une histoire de haine de l’étranger, un affrontement mortifère entre les mondialisés et ceux qui n’ont plus le droit qu’aux bribes. Peut-on faire ce qu’on pense être le bonheur des gens malgré (ou contre) eux ? Une œuvre puissante et profonde comme on en voit peu aujourd’hui et des acteur (tous) époustouflants.
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♦ « Saint Omer » d’Alice Diop (2h02)
par Michèle Robach
En hiver 2013, Fabienne Kabou abandonne sa fillette de 15 mois à la marée montante sur la plage de Berck-sur-Mer et est condamnée en appel à 15 ans de réclusion criminelle alors que le procureur demandait l’emprisonnement à perpétuité. L’infanticide dépasse les limites de la compréhension. Pourtant, avec Alice Diop et sa coscénariste, l’écrivaine Marie NDiaye, il est possible d’en approcher la complexité et de s’abstraire de tout jugement moral. Ici, l’accusée, une Sénégalaise, affronte les préjugés racistes des Blancs. Elle s’exprime dans un langage érudit. Nous sommes loin des clichés sur les migrants. Une écrivaine parisienne, noire également, assiste au procès. Ces deux femmes semblent reliées par un fil tendu qui augmente le malaise mais contribue à rendre de l’universalisme à cette épreuve désespérément solitaire. Avec sa peau caramel qui se fond dans le décor du tribunal, l’accusée ne se départit que rarement de sa froideur. Seule, la plaidoirie de son avocate suivie du délibéré, la font s’écrouler. Ni accusée, ni victime mais humaine, tellement humaine.
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♦ « Mrs. Harris goes to Paris » d’Anthony Fabian (1h55)
par Marie-Blanche Camps
Mrs. Harris, veuve de guerre, fait des ménages dans les belles maisons londoniennes. Un jour, elle tombe en arrêt devant une magnifique robe Dior d’une de ses clientes. Tant de beauté l’émerveille. Elle aussi, elle en aura une ! Elle réussit à réunir la somme d’argent nécessaire (oui, c’est du cinéma…) et la voilà partie à Paris. Avec sa fraîcheur et son sourire délicieux, elle parvient à amadouer la directrice de la maison de couture (Isabelle Huppert) qui accepte de lui vendre une robe de soirée. La bonté et la gentillesse de Mrs. Harris, campée par Lesley Manville (une Mid !) irradient à l’écran. C’est un feel good movie à voir en version originale qui nous fait rêver et voyager dans le Londres (avec toujours une scène sur Albert Bridge) et le Paris d’après-guerre…
Existe en DVD. Pas encore disponible en streaming.