Cocorico ! Une fois n’est pas coutume, contre le dénigrement systématique, sport national français, chapeau bas au nouveau Louvre d’Abu Dhabi. Un lieu magique pour se poser dans la ville où personne ne marche !
La genèse est belle
Profondément affecté par les attentats du 11 septembre, le cheikh Khalifa Ben Zayed Al-Nahayan décide d’édifier « un rempart contre l’obscurantisme par l’éducation et la culture ». Saadiyat Island, l’île du bonheur, est l’écrin prédestiné pour porter son projet. Elle abritera plusieurs musées emblématiques, chacun construit par un architecte de renom différent. En 2007, un accord est signé avec la France et dix ans plus tard, le Louvre sort des sables ! Un exemple de volontés communes, d’une aventure collective unique et d’une intelligente coopération. Œuvres prêtées par de grands musées français mais aussi acquisition ex nihilo d’une collection permanente. Seul impératif : « représenter toutes les époques et l’ensemble des continents ».
« Dans notre pays, près de 190 nationalités cohabitent, comme les œuvres du musée, venues d’horizons divers. À travers l’art, c’est le monde que le musée permet de visiter. » Hissa al Dhaheri, directrice adjointe Louvre Abu Dhabi
Pari réussi
Fréquentation maximale un matin en semaine, nous entrons derrière un Cheikh et sa suite, au moins une trentaine de personnes, que nous nous empressons de dépasser pour profiter d’une visite à notre rythme. Premier coup de cœur : la scénographie du musée est parfaite. Un voyage à travers les époques et les cultures, toutes les cultures, de la préhistoire à nos jours. Aucune censure. Un Christ voisine avec un tableau mythologique où tous les protagonistes sont nus. Une salle, particulièrement touchante, présente une Bible, un Coran et une Thora, acquise sur demande express du Cheikh.
« Le parcours muséal s’interroge sur la simultanéité dans la création humaine de certains phénomènes : comment, par exemple, l’idée de maternité peut être traitée dans différentes civilisations. L’observation parallèle de ces phénomènes civilisationnels est l’une des vocations d’un musée universel. » Jean-François Charnier, directeur scientifique de l’Agence France-Muséums
Les mille et une nuits !
Pour sublimer ce dialogue inter culturel, il fallait un écrin féerique. Et là encore, pari réussi et « méga » coup de cœur. Jean Nouvel a frappé très fort. L’immense canopée du dôme central, tel un moucharabieh géant diffuse au travers de ses étoiles entrelacées, une pluie de lumière. L’eau qui s’insinue autour des bâtiments associée au « dôme parasol » géant apporte une fraîcheur réconfortante. Et la nuit ? Une constellation d’étoiles s’offre à vos yeux émerveillés.
« C’est un musée de l’espoir, il ouvre sur la connaissance des mondes. Il veut créer un monde accueillant, associant dans la sérénité les lumières et les ombres, les reflets et les calmes. » Jean Nouvel
S’il est vrai que les collections de peintures auront un goût de trop peu et de déjà vu pour nous français, soyons certains que nous ne sommes pas au bout de nos surprises dans ce pays de la démesure. « Nous ne sommes encore qu’aux prémices d’une nouvelle histoire qui s’écrit » affirme Manuel Rabaté, directeur du musée.
Agnès Brunel-Averseng