Drôle de nom pour une exposition ! Emprunté au titre de la pièce Qui a peur de Virginia Woolf ?, les organisateurs ont voulu pointer du doigt cette richesse de la production photographique « féminine » entre les années 1839 et 1945. Elles sont ainsi plus d’une centaine dont vous découvrirez les tirages, répartis entre l’Europe et les États-Unis, d’une Américaine Harriet V.S. Thorne qui mettait en scène des nus masculins à une Britannique Madame Yevonde qui a utilisé le procédé couleur Vivex, en passant par la Mexicaine Lola Alvarez Bravo et ses natures mortes.
Ces dames à l’œil aiguisé ont dû se pousser en avant pour exister. Souvent cachées derrière leur photographe de mari ou appartenant à la grande bourgeoisie anglaise où les femmes ne travaillent pas, elles ont été peu étudiées jusqu’à aujourd’hui. La découverte de leurs clichés nous montre que les autoportraits sont peu pratiqués au 19e siècle mais se développent dans l’entre-deux guerres et qu’ils deviennent très vite des outils d’expérience identitaire et nous explique que ces femmes ont envahi peu à peu tous les espaces d’images, la mode, le sport, la publicité, en fait tous les aspects visibles de nos sociétés, avec un regard moderne et engagé.
Conservateurs, historiographes, tous ont travaillé pendant quatre ans pour faire émerger cette exceptionnelle collection jusqu’à déterrer des portfolios de daguerréotypes, constater que les mouvements féministes des années 70 ont changé les mentalités et fait ressusciter des archives oubliées pour donner enfin leur juste place à ces artistes féminines souvent employées dans les studios de photos comme « assistantes » parce qu’elles représentaient une main-d’œuvre bon marché !
Vicky Sommet
Deux lieux d’exposition : Musée de l’Orangerie pour la période 1839-1918 et Musée d’Orsay pour la période 1918-1945 jusqu’au 24 janvier 2016.
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