Vingt ans à peine, venues de France, des jeunes femmes comme Tereska, ont rejoint le Général de Gaulle à Londres. Premières engagées dans les Forces françaises libres, conscientes des dangers qu’elles encourent, elles seront confrontées à une nouvelle vie, fières et heureuses de participer à l’effort de guerre.
Une Française libre
Suite à l’annonce de la création d’un corps féminin, Tereska est arrivée seule à la gare de Victoria. Visite médicale obligatoire pour obtenir un « bon pour le service » et être recrutées pour un « Corps » nommé « Féminin ». Admises, elles remplaceraient des hommes qui pourraient ainsi être affectés à des unités combattantes. Vêtues de leur uniforme, veste, jupe en laine rêche, chemise, cravate et bas kaki, soutien-gorge en coton rose et culotte en jersey, elles ont dû d’abord apprendre à marcher au pas.
La vie de caserne
Le Général de Gaulle passe en revue le 14 juillet les soldats de la France libre « Le cœur lourd mais la tête haute … nous portions, confondus en nous-mêmes, l’orgueil d’être des Français libres et la honte de savoir la France asservie ». Logées dans une maison devenue caserne, elles furent assignées à des tâches variées, chauffeuses, infirmières, secrétaires, employées au chiffre ou agents de liaison. Aux portes des magasins, un écriteau « business as usual » mais, tout autour, des immeubles en ruine, des gravats et des vitres brisées, la ville était bombardée toutes les nuits.
L’armée des Volontaires civils
La Croix rouge envoyait des missives en France pour rassurer les familles et des lettres de réponse arrivaient avec des mots barrés par la censure. Leur jeunesse triomphait quand elles sortaient pour boire et danser avec les militaires, Français ou soldats des armées en exil. Parfois les aventures d’un soir donnaient lieu à des grossesses non désirées et se terminaient par une annonce affichée dans le hall pour dire qu’une telle avait été « réformée pour raisons de santé ». Jusqu’au jour du débarquement en Normandie.
Les récits d’une pionnière
Après la guerre, Tereska publia aux États-Unis un roman sur sa vie « Women’s Barracks », best-seller vendu à 4 millions d’exemplaires, traduit en treize langues et en 2000 son journal de guerre sous le titre « Une Française Libre », d’abord simple planton, puis au service de presse et d’information de la France libre, enfin à la section du courrier militaire du Bureau central de renseignement et d’action, les services secrets du Général.
« J’étais encore cette innocente petite fille qui rêvait de l’armée. En un an, j’ai connu la séparation, la solitude, la vulgarité, l’amour, le vice, l’alcool, dans une atmosphère de bombardements, de mort, de fatigue, de solitude morale et religieuse ».
Petite femme souriante mais énergique, on a du mal à imaginer qu’elle s’est embarquée seule à vingt ans pour l’Angleterre. Elle n’est plus aujourd’hui, mais je garde d’elle le souvenir d’une femme intrépide et lucide avec le regard aiguisé sur un monde déchiré.
Vicky Sommet
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« Jeunes femmes en uniforme » aux éditions Phébus
« Une Française libre » aux éditions Phébus