Richard Cœur de Lion, Henri IV ou Louis XIV, ces fantômes aux noms illustres rendent visite à Chantal Morvan chaque nuit en son castel de Palluau où elle vous accueille l’été pour vous conter l’histoire de la création du Québec par Louis de Frontenac et vous faire découvrir la vie des colons de la Nouvelle France au 18e siècle.
Les hasards de la vie
Travaillant comme acheteuse chez Rhône-Poulenc, Chantal Morvan rencontre un fournisseur qui deviendra son futur mari. Ils montent ensemble une entreprise de produit issus de l’oléo-chimie, chimie des corps gras non-polluants, utilisés pour la cosmétique, le tabac, l’alimentation comme la glycérine pour fabriquer les bûches de Noël en septembre et les conserver jusqu’en décembre. La retraite approchant, ils achètent ensemble un château et ce sera comme dit Chantal « Le début de ma troisième vie ».
Un amour de chapelle
Des peintures murales remarquables du XIIème siècle ont été à l’origine de l’achat de ce château¹, avec tout ce que cela suppose d’investissements financiers mais aussi d’investissements personnels. Chantal Morvan, après les architectes et les différents artisans travaillant à la restauration de ce témoin de 1 000 ans d’histoire, est devenue caissière pour vendre les tickets d’entrée, guide quand il faut accueillir des groupes ou animatrice quand les familles françaises ou canadiennes visitent Frontenac.
Louis de Frontenac, le colonisateur
Construit en 1073, le château a une façade féodale et une façade Renaissance. Sur une hauteur, il surplombe Palluau-sur-Indre, un joli village entre Loches et Châteauroux. C’était la demeure de Louis de Frontenac, deux fois gouverneur de la Nouvelle France, missionné par Louis XIV, avec un mandat que lui remit d’Artagnan, pour aller installer une colonie avec des femmes et des soldats pour maintenir la paix et travailler avec les populations amérindiennes pour la traite et le commerce des fourrures, en créant des comptoirs face aux Anglais. Si le fort Frontenac a aujourd’hui disparu, le Québec a conservé sa mémoire avec l’hôtel de la vieille ville, Fairmont le Château Frontenac. Mort à Québec, quand on proposa de rapporter son cœur à son épouse restée en France, elle refusa car il avait été l’amant de nombreuses femmes dont la Montespan².
L’Histoire en mouvement
Le parc du château de 13 hectares a été conçu pour revivre cette épopée³, avec le tipi des Améridiens, la ferme des colons, le poste de traite des fourrures et la cabane des coureurs des bois. Dans le château, meubles et tableaux permettent de feuilleter aussi cette page d’histoire. « Je fais visiter à certains la grande cuisine qui est dans la partie privée car nous habitons sur place depuis six mois. Le chauffage géothermique permet les visites en hiver pour les groupes et pour les villageois, l’entrée est gratuite. Nous essayons aussi de mettre en place un Passeport pour visiter tous les autres châteaux de l’Indre, Valençay, Bourges, Argy, la maison de Nohant, mais ce n’est pas facile car beaucoup de demeures sont privées. »
Châtelaine, mais surtout intendante : « C’est un défi que nous nous sommes lancés, mon mari et moi, et, bien qu’il reste encore beaucoup à faire, ce travail de Titan, qui, au lieu de nous vieillir nous rajeunit, ne nous fait pas peur. Foi de châtelains, nous irons au bout de cette renaissance et la partagerons avec ceux de France et de Nouvelle France amoureux de l’Histoire. »
Vicky Sommet
¹Château de Palluau Frontenac, Palluau-sur-Indre (36). Ouvert en juillet et août tous les jours (sauf les lundis) de 10h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 (dernière visite guidée). Pour les groupes toute l’année sur réservation.
²Louis de Frontenac, au lieu de rester discret sur ses aventures extra-conjugales avait fait circuler un pamphlet se moquant du Roi. D’où peut-être son départ pour l’Amérique…
« Je suis ravi que le Roi notre sire,
Aime la Montespan.
Moi, Frontenac, je me grève d’en rire
Sachant ce qui lui pend.
Et je dirais sans être des plus lestes :
Tu n’as que mes restes Roi ! »
³Louis de Frontenac, comte de Palluau de Jean-Roger Morvan aux éditions Esprit des Lumières.