Doc peint et Eugénie consulte

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Médecin généraliste, sexologue, peintre… Quelle belle palette d’ombres et de lumières conjuguées mais indissociables pour une seule femme. Retour sur le destin d’Eugénie Adorian, femme en blanc mais passionnée de couleurs.

Soixante-huitarde et médecin

Née à Paris dans le XIIe, Doc Eugénie évolue dans un milieu fermé où ses parents lui parlent peu, y compris de ses origines. Les amis ne sont pas légion chez elle, mais on lit. Bac en poche en 1968, elle rêve d’être psychiatre et se lance dans la médecine. Elle finance elle-même ses études à l’aide d’une bourse et quitte (« enfin ! » s’exclame-t-elle) la maison à 20 ans. Un stage en psychiatrie la convainc qu’elle n’est pas faite pour ce métier (« Pas tant pour les malades que pour les équipes encadrantes…» sourit-elle). Elle s’installe finalement comme généraliste dans le XIe arrondissement.

« Dans mon berceau, une odeur d’après-guerre. Avec des confusions diverses. Deux messages me guident : les filles doivent vivre comme les garçons et les études ouvrent les portes. L’éclosion du féminisme me donne accès à une nouvelle planète, une belle palette… Je garderai la compassion comme manivelle de médecin et j’éduquerai ma passion en émotions, représentations et couleurs avec la peinture. Lumières et ombres sont indissociables…»

Découverte de la sexologie

Un Festival de Cannes en 2006 lui fait découvrir que tout tourne, particulièrement cette année-là, autour de la sexualité : « Puisque la culture en parle et que les artistes expriment toujours leur siècle en avance, je décide d’explorer le sujet. »  En 2008, elle suit des études de sexologie qui durent trois ans puis s’installe et tient une consultation en parallèle de son cabinet de généraliste. Sa patientèle ? Des femmes le plus souvent, jeunes ou non, qui connaissent des troubles de la libido ou se posent des questions : « J’écoute, je dénoue. Quelques séances suffisent. Je renvoie vers des spécialistes quand il le faut. »

Découverte de la peinture

Sa mère peint, son père dessine. Eugénie a toujours dessiné. L’envol de la carrière de son mari producteur de films quand elle atteint la quarantaine est l’élément déclencheur qui lui donne envie de revenir à ses origines. Manquant de technique, elle cherche un atelier. Puis une fois par semaine va y travailler : nus, natures mortes… Elle s’initie aux bases, fait ses couleurs elle-même, apprend à les faire vibrer, à lâcher son pinceau. Puis elle arrête et se lance seule : « Tu arrêtes quand tu commences à faire comme le maître… »

« La médecine représente la maladie et la mort en toile de fond. Je peins pour une vie meilleure, plus de bien-être, l’expression, l’émotion, la représentation d’Éros la vie, oublier le temps, c’est une dynamique comme le sport peut l’être pour d’autres. Lumière et ombre sont indispensables. Je peins pour m’extérioriser, être en dehors de la gravité… »

Aujourd’hui en peinture, elle ne fait plus de copies. Son espoir ? Aller aux portraits. Elle a toujours une toile en cours : « On ne peut pas s’arrêter, sinon on perd la dynamique. » Elle fait une expo tous les trois ans environ et vend toutes ses toiles. Elle n’en a gardé que quelques-unes. À un âge où ses confrères arrêtent et passent l’éponge, Doc Eugénie reste médecin pour ses patients. Comment les laisser tomber ? Elle assure toujours deux consultations généralistes par semaine et la sexo le jeudi soir. Pour garder les ombres qui vont si bien avec les lumières ?

Marie-Hélène Cossé

©Questions Mid&Plus

-Le cap de Mid ? La peinture m’a accompagnée. Je suis plus heureuse avec le temps que plus jeune.
-Comment appréciez-vous le temps qui passe ? Un peu peur, mais j’essaie d’en profiter au maximum. Un conseil : il suffit de prendre une photo et de la regarder dans dix ans, tu te diras que tu étais très belle !
-Un conseil à donner ? Choisir un projet.
-Vos trucs et astuces pour une journée positive ? Rire ! Et sinon en face de l’appartement habite un très vieux monsieur hongrois d’origine, comme moi, passé par les camps. Je regarde en me levant si ses volets sont ouverts et quand je les vois je me dis encore une jou
rnée pour lui !
-Une discipline de vie pour vous entretenir ? De la marche rapide tous les jours, de la Gyrotonic une fois par semaine et la piscine. Je mange peu au dîner. Pas d’alcool, plus de féculents, pas de pain, moins de viande.
-Votre tenue vestimentaire idéale ? Féminine. Jupe et robe. Pas trop de talons.
-Un livre sur votre table de nuit ? Plein de livres en même temps. En ce moment : un livre d’Italo Svevo, Le potentiel érotique de ma femme de Foenkinos, Chamboula de Paul Fournel.
Quelle musique aimez-vous ? La musique Klezmer, celle d’Arizona Dream.
-Si vous pensez à votre mère, à votre grand-mère, quelle femme êtes-vous ? Je suis la femme que ma mère n’a pas été…
-Quelles sont les valeurs que vous souhaitez transmettre ? Compréhension, empathie, équilibre homme/femme, solidarité.
-Une phrase à citer : « Je ne veux pas être aimée, je veux être préférée » (Gide).
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