Combattre les clichés, contribuer à la valorisation de l’image de la femme et à la mise en valeur de son rôle dans la société marocaine, c’est le défi que s’est lancé Khadija Boujanoui, qui est née et a grandi au Maroc, fait ses études supérieures en France, avant de retrouver son pays natal et d’y faire carrière. Click here to read this article in English*
La rage d’y arriver
Khadija naît à Casablanca dans une famille modeste avec des valeurs fortes et des parents persuadés que seules les études donnent une vie meilleure et qu’il faut se surpasser. « Je n’ai jamais eu le sentiment d’être différente de mes frères. » dit-elle. Après une scolarité à l’école publique, elle suit son rêve et, malgré les réticences de ses parents, part en France pour suivre à Nice des études de finance-gestion. Elle décroche un premier boulot formidable d’analyste financier à Monaco qui lui permet de voyager à l’étranger une semaine sur deux, mais l’envie de rentrer au Maroc lui vient. Elle revient à Casablanca où elle occupe différents postes de directeur financier avant d’être recrutée par 2M¹ en 2005. L’aventure commence !
« Il faut arracher les choses. Si je ne m’étais pas imposée et si je n’avais pas saisi les opportunités, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui ! »
Une chaîne citoyenne en faveur des femmes
Khadija a toujours été passionnée par les médias et s’investit avec plaisir et énergie dans son nouveau poste de directrice financière et du contrôle de gestion de la chaîne. En 2013, le directeur général décide de capitaliser sur l’engagement de la chaîne et crée un comité parité² dont il demande à Khadija de devenir présidente. Si les femmes, dans cette chaîne qui compte 650 salariés, sont à quasi parité dans les postes d’encadrement, c’est loin d’être le cas en matière de présence à l’écran ou sur les sujets pointus, économie ou politique par exemple. D’où le rôle du comité et ses actions avec notamment la mise en place d’Expertes.ma, un site gratuit répertoriant des femmes expertes au Maroc ainsi que dans le monde entier.
État des lieux
Les femmes sont présentes dans tous les domaines au Maroc, dans la société économique comme dans la société civile. Le principe d’égalité entre hommes et femmes a été institué dans la constitution de 2011 et le pays a ratifié ces 50 dernières années pratiquement toutes conventions internationales pour la protection des droits des femmes. Dans la pratique et malgré les avancées en matière d’éducation, il reste difficile de faire bouger les mentalités, parfois très archaïques. Pour Khadija, le gouvernement a une responsabilité importante dans ce domaine : rendre l’école obligatoire partout, faciliter aux filles l’accès aux études supérieures et obliger les entreprises à la parité quand le mérite est là.
« La responsabilité incombe à tous, gouvernement, famille et médias, de les changer. Bien souvent, les clichés et les stéréotypes sont transmis par les femmes, et notamment les mères, mais apparaissent aussi dans les médias. »
Khadija, toujours en poste, s’est organisée pour dégager du temps afin d’oeuvrer inlassablement au comité parité de la chaîne. Elle voyage dans de nombreux pays du bassin méditerranéen pour intervenir dans des conférences et essaimer. Pour elle, rien n’est acquis, le combat continue : « De nature optimiste, je crois en un demain meilleur pour les femmes. Il faut leur donner la place qu’elles méritent. »
Marie-Hélène Cossé
*Article translated by Katie Wilkinson for My French Life.
¹Première chaîne de télévision privée créée en 1989 : une vraie révolution dans le paysage audiovisuel au Maroc ! Puis l’État entre dans le capital en 1998 à hauteur de 72%.
²2M s’engage dans sa charte à une démarche volontariste pour la valorisation de l’image de la femme et la mise en valeur de son rôle dans le développement d’une société marocaine égalitaire et moderne.
Les questions Mid&Plus
Alors, 50 ans ? J’aime bien mes 50 ans. C’est l’âge pour la femme de la maturité. On ne se prend plus la tête, on prend le meilleur de la vie. On a acquis de la sagesse, du recul, on a une autre philosophie de la vie.
Votre moteur du matin ? Je suis heureuse quand j’ouvre les yeux. Je suis dans la gratitude ce qui déclenche des bons mécanismes. Chaque jour est différent et permet de mettre son grain de sable à l’édifice.
Un rituel ? Oui, café et douche. Je fais du sport en fin de journée pour recharger mes batteries.
Votre fierté ? Mes deux filles, Soraya et Lamia, qui sont plus épanouies que je ne l’étais à leur âge, déjà plus avancées et surtout plus vigilantes.
La retraite ? Le jour où je m’arrêterai, je mourrai !