Noha cuisine et aime manger, Noha s’occupe d’enfants et les guérit, Noha s’intéresse aux plus démunis en soignant gratuitement les plus pauvres, Noha sait voir la beauté en toutes choses et écrit ses impressions. Portrait d’une femme pédiatre aux multiples talents.
Beyrouth, mon amour
« Beyrouth, une ville qui se vit et ne s’explique pas. » Après Alep, Noha habite Beyrouth puis Paris. Encore aujourd’hui, ce sont ses deux ports d’attache avec une passion pour le Liban. « Beyrouth est un projet en perpétuel mouvement, une ville qui s’apprivoise et qui s’appelle reviens. Donc je reviens toujours. Une longue corniche, des façades anciennes qui racontent des histoires, mais depuis le 17 octobre dernier, le peuple vit solidaire malgré la pauvreté qui s’est installée avec les réfugiés d’Irak, les Coptes d’Egypte et, chose nouvelle, les Libanais qui mendient et surtout les enfants des rues, ce que moi en tant que pédiatre, je ne peux accepter. »
Le goût plutôt que la haine
Une éducation sévère dans une famille unie et heureuse lorsqu’arrive la Guerre des six jours. « Une école de vie ! » Encore enfant, elle part à Beyrouth avec une famille éclatée et une grand-mère qu’elle ne reverra plus jamais. Déjà toute petite, Noha aime manger, gourmande et peut-être néophobe. « L’enfant se méfie à cause de son cerveau reptilien des goûts nouveaux, mais j’ai toujours été très curieuse du contenu de mon assiette. Tout était cuisiné à la maison et on accueillait des effeuilleuses de roses pour faire la confiture ; trois journées en mai, toute la maison embaumait la rose, un exemple d’émancipation des femmes, parce qu’elles quittaient leur village et le pécule gagné leur donnait une liberté face au régime paternaliste des hommes, elles qui n’avaient jamais été à l’école. »
« Ils me prennent par le bout du cœur »
« Mes petits patients m’apportent beaucoup ». Noha, l’ainée, s’est occupée de sa fratrie quand ses parents partaient au Liban. Avec un credo : « La joie est la seule maladie que je souhaiterais contagieuse. Un jour, le petit Karim est arrivé avec une méningite et il est décédé parce qu’il n’avait pu accéder à l’hôpital. J’ai alors décidé de créer l’association Les Petits soleils, en me disant que c’était scandaleux au XXème siècle qu’un enfant n’ait pas accès aux soins et meurt parce qu’il est pauvre. Surtout après avoir échappé à la guerre car son père avait traversé tout le Liban pour faire soigner son enfant. »
Les Petits soleils prennent en charge les soins médicaux des enfants pauvres, toute pathologie confondue, consultations, vaccins, opérations, suivi psychologique, scolarité spécialisée, prothèses auditives ou oculaires. « Un ami non-médecin, qui m’aide dans cette grande aventure, s’il me voit hésiter, me rappelle que j’ai prêté le serment d’Hippocrate ! Mais je n’ai pas trop à me forcer car rien ne peut me donner plus de joie qu’un enfant qui court après avoir soigné son pied bot ou une petite-fille qui se redresse après avoir été opérée d’une scoliose sévère. »
Vicky Sommet
« Il n’y a pas de honte à préférer le bonheur » de Noha Baz (Editions Alisio, octobre 2019)
Association Les Petits Soleils, Beyrouth