Après une belle expérience professionnelle, les joies et les bouleversements de la vie, Patricia de Solières vient de publier son premier roman, Les Révélées, et revendique cette singulière métamorphose qui la fait entrer dans le monde de la fiction.
Une carrière ascendante
Entrée chez IBM avec une double formation de littérature et psychologie clinique, Patricia va évoluer en tant que cadre dirigeant, appréciée pour ses qualités commerciales et son leadership. Elle acquiert une culture entrepreneuriale dans un environnement dont elle reconnaît qu’il aurait pu être différent, puisque son rêve était de devenir journaliste. Alors que beaucoup de femmes de sa génération et de son milieu renoncent à leur emploi pour s’occuper des enfants, elle en a la charge en solo et interrompre une carrière ascendante n’est pas une option. De nouvelles opportunités d’emploi et de formations se présentent et Patricia décide de créer sa propre entreprise de conseil. Elle se sent portée par des idées neuves, comme celle de combiner sa formation commerciale et clinique avec une expertise plus technique qu’elle trouve chez des ingénieurs, afin de définir une offre de conseil plus ciblée.
Le succès est au rendez-vous. C’est l’autonomie retrouvée et progressivement, une meilleure articulation entre les multiples espaces qui organisent sa vie quotidienne. C’est aussi du temps libéré pour murir un nouveau projet plus intime.
L’épanouissement dans l’écriture
Pourquoi écrit-on ? Dans le cas de Patricia, c’est parce qu’elle a déjà écrit. Bien avant ce premier livre, les mots ont fait partie de sa vie. Dès l’enfance, des rédactions, dissertations, poèmes, plus tard des écrits professionnels, et, récemment, des nouvelles littéraires qui lui ont donné l’envie de voir plus loin, plus haut. Patricia est ainsi passée du « savoir écrire » au « aimer écrire », jusqu’à trouver sa vraie place. Quand vient l’envie de communiquer avec un public des idées, des images, des émotions, de passer du projet de l’écriture pour soi à celui de l’écriture pour les autres. La rédaction de son roman lui a donné l’occasion de s’éloigner des trépidations de la vie et de retrouver des vibrations plus intimes afin d’y déposer une part de ses croyances.
Écrire pour exprimer sa singularité et trouver des mots pour aborder les thématiques chères à son cœur : la quête existentielle, le pacte avec la vie que représente le fait de faire un enfant, le poids de la famille, l’indépendance de celle qui conçoit un enfant seule, le choix de la vie contemplative, la dépression, la rencontre avec Dieu et la foi comme force spirituelle. Vous l’aurez compris, l’esprit de Patricia de Solières n’est pas au badinage.
Une plongée dans un labyrinthe
Dans ce premier roman, on suit Camille, une jeune femme envahie par un sentiment d’inquiétude et d’angoisse qu’elle tente d’apaiser par l’ordre et la symétrie. La découverte de la photo d’une petite fille du siècle dernier qui lui ressemble, avec le prénom Madeleine inscrit au dos, va la troubler au point de l’entrainer à la recherche des ombres et des secrets de son origine. Le récit de l’histoire familiale ressemble à une enquête policière avec des témoins, des pièces à conviction, des zones d’ombre et des non-dits. Personne ne lui a révélé l’existence de cette parente, Madeleine, religieuse et cloîtrée. L’enquête va s’incarner dans le vécu de Camille pour devenir un moteur de la narration. Au fil de l’écriture, les voix différenciées de Madeleine et Camille se répondent, à certains moments avec violence (toutes deux ont hérité de la même instabilité nerveuse) à d’autres, avec douceur (Madeleine est habitée par la foi, Camille la découvre au cours de son existence).
C’est un récit qui brasse les êtres et brouille les frontières entre présent et passé, profane et sacré, raison et folie, spiritualité et matérialité. Il y a de la grâce et de la jubilation dans cette en-quête qui aboutit à une révélation.
Patricia a vécu l’écriture de ce premier roman comme une occasion d’avancer, avec toujours le souci de donner une place centrale à ce puissant levier du bonheur qu’est le plaisir. Plaisir d’écrire, de publier, d’atteindre les lecteurs. Et comme Camille l’héroïne de son livre, elle ne se perd jamais dans le labyrinthe de son histoire familiale.
Michèle Robach
Les Révélées de Patricia de Solières (chez Charleston, paru le 10 janvier 2024).