L’arrière-saison est une période bénie des dieux pour flâner le long de la Dordogne. Les hordes d’aoûtiens ont regagné leurs pénates. Les couleurs sont magiques : la pierre, l’eau, la végétation baignées d’une lumière profonde. Tel Cyrano de Bergerac, venez goûter à « la verte douceur des soirs sur la Dordogne ».
Le Périgord Noir. Impossible de vous parler des Périgords en quelques lignes. Parce que, le Périgord, il n’y en a pas qu’un mais quatre ! Le blanc, le vert, le noir et le pourpre. Tous différents par la couleur de la terre et des cultures, par les teintes des édifices et leur architecture. Mais si je dois en choisir un, c’est sans hésiter le noir. Calé entre les vallées de la Dordogne et de la Vézère, il est dit noir parce que largement planté de chênes verts au feuillage sombre, dense et persistant et de châtaigniers. Dans les larges vallées poussent les noyers, le blé blond ondoyant au vent, le maïs et le tabac aux feuilles odorantes. Sans oublier les fraises que l’on déguste d’avril à novembre.
La vallée de la Vézère dite « la vallée de l’Homme » vous projette 30.000 ans en arrière. De Montignac au Bugue, elle est jalonnée de sites préhistoriques et d’habitations troglodytes (14 d’entre eux sont classés au patrimoine mondial de l’Unesco), de grottes et de gouffres. Les uns ornés de peintures rupestres dont Lascaux est évidemment le fleuron, les autres décorés de stalactites et de stalagmites tel le Gouffre de Proumeyssac, la cathédrale de cristal. Enfin, incontournable de la vallée, la capitale européenne de la Préhistoire : les Eyzies de Tayac et son musée, construction contemporaine qui se fond dans la roche et ravit les adultes et les enfants par son approche pédagogique et ludique de nos ancêtres bien avant les Gaulois !
À propos d’ancêtres, ne ratez pas au Bugue le village du Bournat reconstitution d’une ferme village périgourdine évoquant l’atmosphère quotidienne à la fin du XIXe : l’école, la chapelle, la mairie, le lavoir, le chai. Tout y est parfaitement restitué, dans son jus. À la forge, au fournil, au moulin à huile de noix, de vrais artisans raniment les métiers d’autrefois. Les attractions foraines et les manèges anciens complètent le décor.
Et si le château de la Belle au bois dormant a bercé votre enfance, rendez-vous au Château de Commarque, endormi pendant des années recouvert par une végétation impénétrable, il reprend vie grâce à l’acharnement de son propriétaire qui inlassablement poursuit son travail de fourmi.
Au confluent de la Vézère et de la Dordogne, arrêt obligatoire au village de Limeuil. Classé parmi les plus beaux villages de France. Perdez-vous dans les ruelles, découvrez les lieux cachés, visitez la chapelle Saint-Martin, édifice roman du XIIe siècle, érigé par Richard Cœur de Lion en expiation du meurtre de Thomas Becket.
Changeons de rivière et continuons notre voyage dans le temps en remontant la Dordogne ou en la descendant en canoë à la belle saison. Nous voici au royaume des villages de cartes postales et des châteaux. On en compte pas moins de 1.500 ! La légende raconte que Saint-Pierre, après avoir distribué les châteaux à travers la France, s’arrêta en Dordogne fatigué et y vida son sac avec tous ceux qui y restaient. Et il y en a pour tous les goûts et toutes les époques.
Ceux datant de la Guerre de Cent ans quand l’Aquitaine alternait entre domination britannique et française et où les seigneurs retournaient leurs plaques de cheminée selon que l’occupant était anglais ou français. Pile « God save the king », ou face « Dieu protège le royaume » ! Beynac aux mains des français se battait contre Castelnaud de l’autre côté de la rive sous domination anglaise.
La Renaissance, avec, parmi bien d’autres, le Château des Milandes devenu bien plus tard la résidence de Joséphine Baker et de sa tribu arc-en-ciel. Vous plongez dans son univers musical et mélancolique. Admirez les jardins français qui viennent d’être entièrement refaits.
Écartez-vous un peu de la vallée et découvrez Sarlat, ville emblématique de ce Périgord noir. Cité de la Boétie, ami de Montaigne, aux rues pavées et aux innombrables monuments classés. Empruntez le chemin des Bastides (Domme, Monpazier…) et des abbayes (Cadouin, Saint- Avit…) qui racontent la riche histoire de ce fier territoire.
Vous l’aurez compris, un week-end n’y suffira pas. Découvrez le Périgord au rythme de ses rivières et régalez-vous dans toutes les acceptions du terme. Et si je peux vous donner un conseil de MidPérigourdine depuis toujours : perdez-vous ! En voiture, à pied, empruntez les petites routes et les sentiers pour découvrir, être surpris et… forcément conquis.
Agnès Brunel-Averseng
- Vos haltes gourmandes :
– Le Garden Party à Limeuil: bel accueil, on s’y régale et on surplombe la vallée. Place des fossés, Le Bourg-Haut, 24510 Limeuil-Haut. Tél :05 53 73 36 65
– Le Vieux Logis à Trémolat, établissement étoilé aussi beau que bon. Un havre de douceur, de paix et de volupté pour les papilles.- Les Marchés :
Sarlat, Saint-Cyprien, Le Bugue, Périgueux. Vous y trouverez tous les produits locaux à déguster sans modération : foie gras et confits, noix, cabécou, trappe d’Échourgnac (fromage fabriqué par les religieuses, à base de lait de vache et affiné à la liqueur de noix), fraises (goûtez les Mara, au parfum si subtil de fraises des bois), vins de Bergerac (Monbazillac, Pécharmant). Et évidemment, les champignons : cèpes, girolles et truffes. Un festival de saveurs.- Une adresse à se transmettre entre connaisseurs : Ets Arvouet au Buisson-de-Cadouin qui décline tous les produits du terroir avec inventivité et authenticité.
- Le Périgord et le Cinéma : depuis toujours les paysages, les villages et les monuments du Périgord ont inspiré les réalisateurs : Le Boucher tourné à Trémolat, La Fille de d’Artagnan à Beynac et Sarlat, Duellistes à Sarlat et Sireuil, Le Capitan à Biron, Hautefort et Monpazier, Les Visiteurs 2 à Beynac, Le Pacte des Loups…N’oublions pas que Louis Delluc, fondateur des ciné-clubs est né à Cadouin.(Le prix Louis-Delluc récompense chaque année un jeune réalisateur.)