Lauréate des Trophées 2020 des Français de l’étranger dans la catégorie « Ancienne élève des lycées français du monde » pour son association The N’Takou, Georgina Siaba promeut la langue de Molière en Afrique. Crise sanitaire oblige, elle n’a pas pu venir à la remise des prix en septembre dernier à Paris, mais son message vidéo projeté au Quai d’Orsay m’a interpellée : « J’avais envie de restituer un petit bout de cette merveilleuse expérience à ma communauté… »
Georgina Siaba a fait toute sa scolarité jusqu’au bac dans des lycées français de l’étranger : à Séoul (celui qu’elle a préféré), à Londres, au Congo et au Cameroun. Une fois son bac en poche, direction Paris où elle obtient une licence AES à Paris I – Panthéon-Sorbonne, puis un Master à l’ESLSCA. « Bien que j’aie choisi la finance, j’ai gardé un coeur humanitaire… » Passionnée par les domaines associatif et humanitaire, elle a fait partie d’une association d’étudiants à la Sorbonne, travaillé dans la rue pour Médecins sans Frontière et effectué son service civique pendant un été dans un centre socio-culturel : « J’en garde un très bon souvenir. La directrice m’a donné sa place pour voir le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des sports, Patrick Kanner. Un beau signe de confiance pour moi qui étais très jeune ! »
« J’ai bénéficié d’un enseignement français dans des établissements d’excellence, je souhaite donner à mon tour l’accès à la culture française. »
« Rendre ce que j’ai reçu », c’est ce qui a motivé Georgina à fonder The N’Takou (qui signifie « aide et solidarité » en Yacouba, langue de son pays natal, la Côte d’Ivoire), une association qui milite pour l’accès à l’éducation dans les pays d’Afrique de l’Ouest. Construire et faire vivre des bibliothèques et des ludothèques dans des écoles publiques, telle est la mission que s’est donnée Georgina. La première bibliothèque a été ouverte en 2018 dans une école primaire en Côte d’Ivoire « où il n’y avait rien ». C’est elle, avec son frère et sa soeur, qui ont rapporté de France livres et jeux de société. « On avait le droit à deux valises chacun dans l’avion, on les a remplies. » Deux autres bibliothèques suivront, puis une au Cameroun et une autre au Congo.
« En France, j’ai vu le formidable système des bibliothèques municipales et universitaires. J’ai observé pour créer ma propre association. Je suis Africaine et je connais la réalité des moyens que nous avons ici. Je crois aux valeurs de solidarité et de partage. Je veux restituer l’éducation que j’ai reçue. »
Analyste financière dans un cabinet américain à Paris pendant un temps, c’est en Côte d’Ivoire qu’elle a choisi de revenir, après dix ans d’absence. Elle est aujourd’hui responsable des études de marchés au sein de l’Agence coréenne d’investissement à Abidjan. « Le parcours de développement de la Corée est inspirant. En 1960, il y a eu un éveil de conscience et le pays est maintenant parmi les grandes puissances mondiales avec des entreprises comme HP ou LG… Les Coréens ont une addiction au travail, une notion du respect très poussée et une forte résilience. La devise des Coréens est « Vite, vite et très bien fait ». Il n’y a pas de choc culturel pour moi car j’ai grandi en Corée. » Tout son temps libre est consacré à son association. Elle sollicite l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et l’association des anciens élèves des lycées de l’étranger pour des dons de livres, trouve des bénévoles sur place pour animer les bibliothèques, proposer des activités ludiques et des tournois de jeux.
La crise sanitaire, le confinement et la crise électorale de son pays sont venus perturber son projet de nouvelle bibliothèque. The N’Takou a alors ouvert une banque alimentaire en faveur des cantines scolaires publiques qui manquent de moyens au Cameroun, au Congo et en Côte d’Ivoire. Dans la ligne droite du mantra de Georgina : « Un peu de solidarité internationale et beaucoup d’Afrique… »
Marie-Blanche Camps
Association The N’Takou. L’association a toujours besoin de livres et recherche des bénévoles en France ou en Afrique : écrire à hello@then’takou. Des dons sont possibles également sur : helloasso.
Association des anciens élèves des lycées français du monde