Lorsqu’un grand-père fonde un bagad¹, rien d’étonnant que sa petite-fille tombe amoureuse de la bombarde. C’est ce qui est arrivé à Aela qui, depuis l’âge de 8 ans, n’a jamais quitté cet instrument et a même postulé au prestigieux Bagad de Lann Bihoué pour y consacrer sa vie.
Un bagad militaire
Le seul bagad militaire du pays a vu le jour en 1952 et fait partie de la Marine Nationale. C’est à la base aéronavale près de Lorient que j’ai rencontré le quartier-maître Aela sur un fond de cornemuse. Dans le bâtiment du bagad règne une ambiance jeune et joyeuse, mais pour autant laborieuse et sérieuse. Aela est adjointe au penn soner (chef d’orchestre des sonneurs de bombarde, de cornemuse et des percussions) et a donc des responsabilités administratives qui occupent un bon tiers de son temps, les deux autres tiers étant consacrés exclusivement à la musique.
Un milieu très masculin
Elles sont trois jeunes filles parmi les 30 musiciens et voient ce déséquilibre plutôt comme un avantage. Âgé de 29 ans maximum à son entrée, un musicien(ne) ne peut pas rester plus de 5 ans dans la formation. Les sonneurs sont les joueurs de cornemuse et de bombarde, les caisses claires appartiennent à la famille des percussions. Le milieu de la musique bretonne est très masculin et le milieu de la marine est également très masculin, ce qui explique la répartition très inégale.
Un programme, des projets, un métier passion
La partie musicale est consacrée aux répétitions par instrument et générales, à l’écriture, à la composition et aux représentations entre mars et septembre. L’hiver est consacré à l’accueil et la formation des nouveaux arrivants qui sont au nombre d’une dizaine chaque année et au travail du répertoire musical de 2 heures 30, répertoire qui doit être connu par cœur et sans partition. Après ces périodes si particulières de confinements, les projets redémarrent et un déplacement à Prague se profile peut-être à l’horizon. Pour éviter au maximum l’avion, le trajet s’effectuera peut-être en car. Parfois ce sont les bateaux de la Marine Nationale qui emmènent très loin le bagad. Les sollicitations sont nombreuses et variées pour des manifestations militaires ou civiles, des fêtes locales, des festivals. Aela ne nous cache pas la joie qu’elle ressent à exercer un métier passion et mesure cette chance de consacrer sa vie à la musique. C’est une vie assez communautaire que partagent ces passionnés dont certains vivent sur la base.
Comment expliquer le prestige de cette formation ?
Une partie de la réponse réside peut-être dans le fait que c’est le seul bagad militaire du pays qui a ouvert le dernier défilé du 14 juillet à Paris. Alain Souchon n’a fait qu’accroître sa notoriété en l’inscrivant dans une de ses chansons. Une petite histoire circule racontant qu’il aurait postulé au bagad et n’aurait pas été recruté. Histoire vraie ? Légende ?
Est-ce la musique qui adoucit les mœurs, mais une bonne entente et une vraie chaleur familiale règnent au sein du bagad. Quel privilège j’ai eu de vivre ce moment doux et improbable ! Merci infiniment à eux.
Brigitte Leprince
¹Un bagad est un ensemble musical de type orchestre, inspiré à l’origine du pipe band écossais, interprétant des airs le plus souvent issus du répertoire traditionnel breton. Il est composé de trois pupitres : bombarde, cornemuse écossaise et percussions.
