Juliette Plisson, être juste dans l’intention

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Pas du style à s’épancher sur « ma vie, mon œuvre », discrète, ce dont elle parle le mieux c’est de son travail d’artiste et de son attachement à transmettre avec clarté sa vision du dessin et de la peinture.

Aller à l’essentiel

En cette matinée ensoleillée d’été, Juliette Plisson vous donne rendez-vous à la terrasse d’un café noirmoutrin où elle, sa boîte d’aquarelle et son carnet ont leur rond de serviette. Les lignes de fuite des quais, les verticales des mâts, les volumes bas des hangars à bateaux et les couleurs codifiées des bouées et balises, cela fait belle lurette qu’elle les a imprimés au fond de sa rétine. Pourtant à chaque heure, à chaque jour, la lumière est changeante et son humeur aussi, dit-elle, et prêtent à une nouvelle lecture, à une interprétation revisitée du lieu. Carburant au café-crème – qu’elle réclame avec beaucoup de mousse de lait – elle répond d’une voix douce mais précise aux questions, éludant avec habilité toutes celles qui flirteraient avec l’intime. Ainsi, là où l’on voudrait tirer un fil de la pelote, elle n’évoque que brièvement ses origines : un grand-père architecte et archéologue, un père brillant architecte. Profession qu’elle exercera elle-même jusqu’en 2007. À cette date, afin de voir ses enfants grandir, elle décide de délaisser plans et chantiers pour se colleter à des études de dessin. Ainsi, courageusement, la jeune femme suit assidument des cours de dessins classiques, intégrant différents ateliers jusqu’à comprendre et acquérir cet esprit de vitesse, de spontanéité et de liberté du geste.

©Juliette Plisson

Capter l’âme du moment vécu

Juliette Plisson réfute toute étiquette. Sur son passeport qu’elle présente lors de ses nombreux voyages – en solitaire souvent -, il est spécifié Profession : Artiste peintre. Elle peint avec la même virtuosité paysages urbains, plaines et mers et les êtres qui y vivent. Si Rothko fait partie de sa grammaire artistique, c’est le mouvement Nabi de Maurice Denis et de Pierre Bonnard qu’elle cite en priorité : uniquement pour sa vision de la peinture, précise-t-elle, et non pour sa quête de spiritualité qu’elle balaye d’un revers de manche d’un petit pull marine. Couleurs en aplat, formes schématisées, absence du détail, l’artiste s’abstrait de la réalité pour suivre son instinct et représenter à sa manière ce qui l’entoure. Ce qui guide son œil et sa main ce n’est pas la réalité du lieu mais bien son état d’esprit du moment. Elle partage aussi avec cette école des Prophètes le goût pour le Japon, pays fantasmé puisqu’elle n’y a jamais posé une espadrille mais est capable cependant d’en croquer tout un carnet de voyage. De son Neuilly familial à Shangaï en passant par Singapour s’empile une collection impressionnante d’albums aux couvertures de tissu.

Au-delà de Paris et de Noirmoutier, elle ne se lasse jamais de l’Italie dont elle a même appris la langue. C’est ainsi qu’avec émotion elle évoque un long séjour en compagnie de sa fille Suzanne et annonce, impatiente, un départ automnal pour Padoue.

Alignée avec elle-même

Délaissant le cliquetis des cuillères dans les tasses et le sifflement du perco elle rejoint souvent le silence et la solitude de son atelier parisien. Abandonnant l’aquarelle, Juliette s’attelle alors à de grands formats à l’huile, elle passe à un autre rythme de travail mais toujours avec la même construction : placer les trois lignes essentielles qui détermineront la mise en place de l’espace et où elle ira accrocher la couleur. Derrière la femme réservée, on devine aussi celle capable de partager généreusement sa passion. Ainsi dans le cadre des Artistes à Neuilly, elle a enseigné comment capter avec célérité l’instant et saisir sur le vif les paysages urbains. Pendant le Covid, elle s’est jointe à l’initiative d’un duo féminin, Le Paon, où à travers des ateliers en ligne une approche décomplexante des arts plastiques est proposée. Fruit d’un travail de longue haleine, son livre Lignes et couleurs, dessiner le paysage est un outil pédagogique complet pour celui qui veut comprendre l’espace et se lâcher face à un paysage marin ou urbain.

Sa présence récurrente dans de nombreux salons comme ceux des Artistes Français, le Rendez-vous International du Carnet de Voyage à Clermont-Ferrand ou bien le Salon de la Marine la positionne aujourd’hui dans un statut d’artiste-peintre confirmée et reconnue.

Sortant de sa besace un minuscule calepin en accordéon noirci de croquis et une liasse de flyers annonçant sa future expo, une dédicace et un atelier éphémère sur le port, Juliette, silhouette légère, file parler à ses pinceaux. Oser, se détacher du résultat, utiliser les accidents, derrière cette équation qu’elle formule volontiers se dessine en filigrane une vraie ligne de vie.

Christine Fleurot

Son site –   Le site du Paon

Son actualité

Un livre : Lignes et couleurs, dessiner le paysage (2022) – Librairie Eyrolles – 24 €.
Ses expositions en 2023 – 2024 :
– 20 au 24 septembre – Salon des Beaux-Arts,- Section peinture – Réfectoire des Cordeliers – 15 rue de l’École de Médecine – 75006 – Entrée libre et gratuite.
– 20 octobre au 5 novembre – Matite in Viaggio, Carnets de Voyage  – (Venise-Mestre)
– 17 au 19 novembre – Rendez-vous International du Carnet de voyage – (Clermont-Ferrand)
18 au 21 janvier 2024 – Salon d’Automne – Grande Halle de la Villette.
Ses ateliers :
– 18 novembre à l’occasion du Rendez-vous International du Carnet de voyage à Clermont-Ferrand
– 30 novembre et 1er décembre à la Cité de l’Architecture à Paris.

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