Venin et toxique, on connaissait. Mais venin et médicament, pas vraiment… Les molécules nouvelles sont des perles rares cherchées par les industries pharmaceutiques, mais aussi cosmétiques. Leur travail de recherche porte sur l’utilisation possible de venins. C’est une source de progrès majeur en médecine. Ces venins sont nombreux : plus de 150.000 espèces, avec des centaines de molécules pour chaque espèce. Au total, le réservoir naturel est estimé à 40 millions de molécules ! La biologie moléculaire sélectionne les molécules efficientes parmi ces toxines. L’intérêt se porte sur des enzymes, les peptides. Ces molécules sont très intéressantes, car très stables, très solubles, très sélectives et très puissantes. Elles peuvent aller au contact des cellules nerveuses.
C’est justement le circuit de la douleur ! Si on peut court-circuiter les douleurs avec des antalgiques nouveaux, voici l’avènement de nouveaux médicaments. Il en est de plus efficaces que la morphine, sans tous les effets secondaires. Rappelons que chaque substance est à la fois poison et médicament, tout dépend de la dose. Et puis, c’est aussi une approche du système immunitaire : des peptides issus de venins d’abeilles ou de serpents ont des vertus anticancéreuses !
Et déjà le serpent Bothrops Jararaca a participé à la venue d’un nouvel hypotenseur. Le monstre de Gila a fait reculer le diabète de type 2. Mamba le serpent noir, comme les escargots de mer Conus Magus, sont choisis pour les anesthésies. Un nouvel anticoagulant sorti de venin est prêt. Et la palme revient aux anémones de mer : on reste médusé par leur pouvoir antidouleur et antiépileptique, ainsi que leur influence thérapeutique dans la sclérose en plaques.
Du bio surprenant : à cracher le venin, nous guérirons !
Doc Eugénie
Le Figaro Magazine, 21 février 2014, page 28
http://www.allodocteurs.fr/rechercher.asp?mots=Venin