Gerda Taro, reporter de guerre

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Née en Allemagne en 1910 et morte tragiquement à 27 ans pendant la guerre d’Espagne, Gerda Taro fut l’une des premières femmes reporters. Davantage reconnue comme compagne du célèbre photographe Robert Capa, son travail mérite pourtant une place de pionnière dans le photoreportage de guerre.

Sa longue période d’effacement

Elle rencontre le  photographe hongrois, André Friedman (futur Robert Capa) à Paris où se réfugie la plus grande part de l’intelligentsia antinazie d’Europe centrale. Il lui apprend l’usage du Leica. Elle, grâce à ses relations, l’aide dans la vente de ses propres photos aux quelques magasines prestigieux de l’époque comme Vu, ou le journal Ce soir dirigé par Aragon. Ils sont jeunes, beaux et intensément libres et amoureux.Travaillant ensemble, leurs clichés sont mélangés et signés « Capa », Gerda ne s’en soucie guère. Ils partagent la même conception du reportage de guerre et ne cherchent pas à être neutres. Ils veulent témoigner, rapporter, s’engager. La photographie peut être un atout efficace contre le fascisme. Ensemble, ils vont couvrir la guerre civile espagnole aux côtés des troupes républicaines et Capa prend la fameuse photo « Mort d’un milicien ».

Cette signature unique « Capa » a créé une confusion. De plus, comme ils s’échangeaient leurs appareils (Rolleiflex et Leica), l’attribution des clichés demeura longtemps une énigme. En 1938, Capa produit le livre « Death in the Making, Photographs of Robert Capa and Gerda Taro ». Ce livre est dédié à Gerda par Robert inconsolable qui souhaitait lui rendre hommage, Seul survivant, il signe l’ouvrage. Toutefois, les photos qui s’y trouvent ne portant aucune signature, nul ne peut deviner celles qui sont de Capa ou de Taro. Et là… c’est le début de l’effacement de Gerda.

Sa reconnaissance dans les années 2000

En 2001, l’Hôtel de Sully présente une exposition de photos de presse¹, où Gerda Taro est présentée aux côtés des plus grands photographes de l’époque². En 2006, François Maspero lui consacre un livre³ et la biographie d’Irma Schaber est traduite en français4. Irma va convaincre le biographe de Capa, Richard Whelan, le seul à bénéficier de ses sources, courriers et photos conservées à l’ICP5 et l’unique bénéficiaire de la confiance de Cornell Capa, frère de Robert, d’organiser en 2007, une magnifique exposition sur Gerda à l’ICP à New York6. C’est le début de sa consécration. Mais l’événement décisif sera l’annonce en 2008 de la découverte au Mexique d’une valise contenant près de 4 500 négatifs d’images de la guerre civile espagnole entre 1936 et 1939 par Capa, Seymour dit Chim et Taro  La  découverte de cette valise, dont la trace avait été perdue depuis 1939, a provoqué un engouement considérable dans l’univers du photoreportage et de la recherche historique. Ces photos feront l’objet d’une exposition qui a fait le tour du monde.

Le talent unique de Gerda est enfin reconnu et elle existera désormais, non plus comme la Capa’s girl, selon l’expression d’Hemingway, mais comme celle qui a su rendre dans ses photos l’Espagne souffrante mais résistante et héroïque.

Michèle Robach

¹La guerre civile espagnole. Des photographies pour l’histoire.162 photographies prises par 37 photographes sur les fronts d’Espagne pendant la guerre civile.
²David Seymour, Hans Namuth, Georg Reisner ou Robert Capa, Augusti Centelles.
³L’ombre d’une photographe, Gerda Taro.
4Une photographe révolutionnaire dans la guerre d’Espagne (Traduction française, Édition Le Rocher 2006)
5International Center of Photography
6Exposition Gerda Taro

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