D’aussi loin qu’elle se souvienne, Martine Brousse, cofondatrice de la Voix de l’Enfant, a toujours eu à cœur de défendre les enfants, n’ayant jamais supporté l’injustice.
« Un enfant a la vie devant lui. Tout ce qui lui porte atteinte le marque à jamais ». C’est pour cette raison qu’il faut le protéger, entendre ce qu’il dit et lui porter assistance à chaque fois que cela est nécessaire, quitte à s’occuper de ce qui ne nous regarde pas, une phrase prononcée par Carole Bouquet, dès le début de son engagement pour cette cause et qui est le sous-titre du livre qu’elles viennent de coécrire.
Une vie au service des enfants en détresse
Éducatrice spécialisée pour enfants, Martine Brousse s’engage dès ses études en partant en stage en septembre 1979 au Cambodge où elle découvre la réalité : des enfants réfugiés, pour lesquels avec d‘autres, elle décrochera 300 visas et les fera accueillir dans des familles françaises. Pour ne pas rajouter au déchirement de l’exil la froideur d’un séjour en institution.
Elle passe ensuite 10 ans à Meaux, au Tremplin, où elle permet, par la création d’un CAT, l’accès à l’autonomie pour des jeunes handicapés physiques, heureux d’habiter en appartements. Elle n’oublie pas le Cambodge et le Laos, en accueillant de jeunes handicapés physiques, victimes des mines antipersonnel.
Si La Voix de l’Enfant a démarré au Cambodge, en unissant les forces de plusieurs associations pour sauver ensemble des enfants, c‘est dans une brasserie à Denfert en 1981 que le nom est trouvé autour des mots clés : enfance, parole, silence, partage.
Donner des outils à tous les professionnels pour mieux protéger les enfants
Toujours ancrée dans le terrain, Martine comprend vite que le droit peut sauver des vies et s’y forme. En rencontrant magistrats et policiers elle a permis, avec son association fédérative, de mettre en place des unités d’accueil médico-judiciaires pédiatriques (UAMJP, 64 à ce jour) et des salles de confrontation protégée (3 à ce jour), où l’enfant qui témoigne n’a pas à rencontrer à nouveau son agresseur.
Cette chaleur, cet accueil, cette écoute de chacun et ce pragmatisme font partie de l’ADN de Martine Brousse, qui voit toujours l’intérêt supérieur de l’enfant, et cherche à le protéger au mieux. « La France a les meilleures lois du monde dans ce domaine, mais ne les applique pas, d’où tant de drames ».
Faire tomber les secrets de famille
Martine Brousse souligne toujours le chemin parcouru, la légitimité acquise par l’engagement sur le terrain depuis 38 ans, les 11% d’appels en plus sur le 119, avec des enfants qui osent dire les choses. Il faut désacraliser les parents, surtout lorsqu’ils sont violents. « Et lever le tabou sur le secret familial, car un secret partagé évite les dangers – les pères incestueux ne sont pas des récidivistes ». Et l’union des actions associatives fait la force du combat pour la protection de l’enfance.
L’esprit d’équipe au service des plus vulnérables
Aujourd’hui, en France, il meurt un enfant tous les deux jours, victime de mauvais traitements. Les enfants doivent oser parler et nous devons les entendre. Le 119 est le numéro d’appel dédié aux enfants et à toutes celles et ceux qui ont un doute. Parlez-en, prenez conseil au 119. Lorsqu’un enfant souffre, vous occuper de ce qui ne vous regarde pas permet de sauver des vies.
Comme Martine Brousse, faisons nôtre cette phrase qui figure dans la Déclaration des droits de l’enfant, établie le 21 novembre 1959 : « L’humanité se doit de donner à l’enfant le meilleur d’elle-même. »
Anne-Claire Gagnon
Mid&Flandres
– Enfants maltraités est un livre collectif qui présente des cas de maltraitance infantile et donne la parole aux professionnels (procureur, pédiatre légiste, pédopsychiatre, gendarme, médecin coordonnateur d’UAMJP) pour montrer comment, tous ensemble, nous pouvons venir en aide à tous les enfants et prévenir tant de drames, trop quotidiens. Éditions du Cherche-Midi – €18.
– La Voix de l’Enfant fédère 80 associations membres qui interviennent dans 103 pays.
– Observatoire national de la protection de l’enfance