Claudine Monteil, femmes de lettres et historienne a écrit à Simone de Beauvoir pendant un an et ces lettres regroupées nous aident à mieux comprendre la vie des femmes d’hier et d’aujourd’hui. Les arrière-petites-filles du « Deuxième sexe » sont partout. Femmes volontaires, exigeantes ou empêchées, pionnières ou combattantes, mais jamais indifférentes au sort de leurs sœurs.
Avancer c’est conquérir
D’un continent à l’autre, des femmes avancent et progressent, d’autres luttent et parfois reculent. Pour Claudine Monteil, qui a milité auprès de Simone de Beauvoir, sa proximité avec l’écrivaine et philosophe est restée vivace et dans son esprit et dans ses engagements. Prix Nobel au féminin, Prix Goncourt attribué à une femme, le temps fait son œuvre. Liberté d’avorter en recul dans certains pays, conduite féminine autorisée dans d’autres, postes de responsabilité attribuées aux femmes en perte de vitesse face à l’initiative d’un bus pour pratiquer des mammographies au plus près des patientes, le monde bouge vite.
Le « Hegel du féminin » : Bernard-Henri Lévy
Les hommes n’ont pas facilement pardonné à Simone de Beauvoir d’avoir parlé de sexe dans ses ouvrages. Et pourtant dans ses écrits, elle évoque aussi la vieillesse, le droit à la retraite, la soif de justice, les femmes artisans, le contrôle des naissances ou l’économie. « En fait accepter entre les deux sexes la moindre inégalité, c’est consentir à l’Inégalité » soulignait-elle en pointant du doigt les disparités dues au langage, l’utilisation du Mademoiselle pour rabaisser une femme ou le fait de devoir mettre au masculin les adjectifs dès qu’ils étaient plus de deux depuis le 17ème siècle.
« Le féminisme est en tant que politique une longue et patiente action pour réconcilier les hommes et les femmes afin de supporter ensemble la condition humaine ». Une des fondatrices du MLF
La solidarité féminine
Simone de Beauvoir affirmait déjà que les femmes se battent en temps de guerre mais aussi en temps de paix et agissent de manière pacifique pour obtenir la reconnaissance de leurs droits. « Aucun droit des femmes n’est définitivement acquis » ajoutait-elle. Si elle avait été fascinée par les mathématiques, au point de passer un examen dans cette discipline lors de son baccalauréat, domaine où les femmes ne pouvaient espérer entrer dans ce monde fermé au genre féminin, elle aurait aimé voir leurs avancées considérables dans tous les domaines des sciences, l’école de mathématiques fondée par une femme à Barcelone ou la direction féminine d’établissements prestigieux comme Harvard ou Princeton aux Etats-Unis. Artistes, syndicalistes, Franc-maçonnes, les femmes qui bougent sont souvent aujourd’hui épaulées par des hommes, appelés dans les pays anglo-saxons, « Hommes pour le changement ».
« Le Deuxième sexe est reconnu comme un travail de recherche clinique. C’est un grand livre de psychanalyse ». Elizabeth Roudinesco, psychanalyste
Simone et l’avenir des femmes
Devenir mère ramène les femmes à la maison pensait-elle. Si aujourd’hui, la condition des mères représente double travail et parfois demi-salaire mais égalité devant l’impôt, beaucoup d’entre elles transforment leurs difficultés en entreprises. Ces « Mompreneurs » ou mamans entrepreneuses, soit 7 millions de femmes aux USA, ont façonné leur vie professionnelle à l’image de la vie qu’elles souhaitent pour leur bien-être et celui de leur famille. Exemple de modernité à la sortie du livre mais aussi décrié, hué et contesté, les mœurs ont depuis évolué et nos sociétés, même celles de pays lointains grâce aux traductions, doivent beaucoup à Simone de Beauvoir.
Quant à demain, une autre histoire du deuxième sexe reste à écrire…
Vicky Sommet
« Simone de Beauvoir et les femmes d’aujourd’hui » de Claudine Monteil (éditions Odile Jacob, 2011).