La peinture, un hobby, un métier ou plus encore ? C’est l’orientation prise par Chantal Guérin qui a choisi, afin d’étoffer son savoir, d’apprendre à réaliser des fresques, faux marbres, faux bois et stuc. Celle que ses élèves surnomment Chantal à l’huile a trouvé sa voie en enseignant ce qui agrémente le décor quotidien des habitants des immeubles ou des bâtiments institutionnels.
La peinture décorative
Le travail de décoration touche à plusieurs spécificités artisanales, à la recherche, au volet social, et c’est sur de nombreux chantiers que Chantal a appris son métier avant de décider de le transmettre à d’autres. « Je le dis à mes élèves, nous ne sommes pas artistes, nous sommes décorateurs. L’art est un acte de création. Ce qui nous différencie, notre langage qui est plus limité, alors qu’un artiste exprimera ses sentiments et que nous ne faisons que réaliser un travail représentatif ou abstrait mais qui soit lessivable et utilisable au quotidien. Nous ne sommes pas une école de dessin où on fait de l’anatomie, du moulage, mais des exécutants qui ne laissent pas transparaître leur personnalité ».
De la peinture à la décoration
Maman d’une petite fille, elle décide que les chantiers, où les horaires sont extensibles à loisir, ne sont plus de son ressort et qu’il lui faut adapter son rythme de travail à sa nouvelle vie. Elle s’éloigne alors de la création, abandonne la décoration chez des privés, salles-de-bain ornées, plafonds peints, cages d’escalier avec des panoramiques, des exercices pratiques d’école qui lui ont permis de côtoyer des amateurs d’art qui ont du goût et ont passé commande auprès d’une décoratrice qui les comprenait bien. Lumières, couleurs, toutes les palettes d’expression ont été ses outils de travail.
« J’aime le bleu qui apaise, avec une préférence pour les couleurs froides et c’est lorsque je me suis sentie capable de transmettre que je me suis lancée. »
L’art du beau
Le plaisir du contact avec des personnes aisées hier a été complété aujourd’hui avec le public de l’école Artemisia Formation où les élèves viennent d’horizons sociaux différents, chômeurs de longue durée, migrants ou personnes en reconversion. « Je leur apporte un savoir et ils m’apportent beaucoup en retour. Je les vois se découvrir, surtout quand ils ont eu un parcours de vie difficile. Ils se sentent valorisés et voient s’ouvrir devant eux les opportunités d’une vie nouvelle. Ceux à qui on a mis le pied à l’étrier trouvent des chantiers et reviennent nous voir. »
« Les cultures différentes s’expriment par les choix des couleurs, des formes, des inspirations, mais c’est le beau qui prime avant tout ».
Enseigner pour partager une passion
« J’ai formé des dames qui voulaient apprendre la peinture, des hommes en Italie qui voulaient s’éloigner de la peinture à la chaux, des stagiaires qui voulaient apprendre un métier ou se reconvertir. Même si dans le travail du bâtiment il y a surtout des hommes, dans celui de la décoration les femmes sont plus nombreuses. J’emploie la technique de la peinture à l’huile qui donne de la profondeur et je leur apprends à obéir aux clients qui sont les vrais maîtres d’œuvre. En prenant en compte les volets sociaux, anthropologiques et esthétiques, la peinture décorative ouvre sur beaucoup d’horizons différents et le secteur de la décoration touche beaucoup plus de monde que celui de l’art qui est plus élitiste. Le tag ou l’art de la rue est aussi intéressant parce qu’il parle encore à un autre public. »
Et demain ? « Peut-être qu’un jour je me remettrai à peindre pour laisser une trace à mes enfants ! »
Vicky Sommet