Il paraît que sur la notion de « couleur préférée », partout en Europe, le jaune est cité en dernier parmi les six couleurs de base : en tête vient le bleu et… le jaune bon dernier.
Le jaune a été et reste une couleur mal aimée.Pourtant, les peuples de l’Antiquité voyaient en lui une couleur presque sacrée, celle de la lumière, de la chaleur, de la richesse et de la prospérité. Les Grecs et les Romains lui accordaient une place importante dans les rituels religieux, tandis que les Celtes et les Germains l’associaient à l’or et à l’immortalité. Le déclin du jaune date du Moyen Âge qui en a fait une couleur ambivalente. D’un côté, le mauvais jaune, représentant du démon : il est signe de mensonge, d’avarice, de félonie, parfois de maladie ou de folie. C’est la couleur des hypocrites, des chevaliers félons, de Judas et de la Synagogue, de l’étoile jaune de sinistre mémoire, des casseurs de grève et des maris trompés, de la maladie aussi avec son teint jaune ou « caca d’oie ».
Mais de l’autre côté il y a le bon jaune, celui de l’or, du miel et des blés mûrs ; il est signe de pouvoir, de joie, d’abondance. En fait, c’est l’or et le soleil qui ont pris toute la place, souvenez-vous des tableaux au fond doré qui symbolisent la lumière céleste et la perfection divine et que dire de notre Roi Soleil, qui en avait fait sa couleur et le symbole de sa grandeur. Le jaune fut longtemps boudé par les peintres… jusqu’à nos impressionnistes qui en sortant de leurs ateliers, se sont confrontés à la vie et la lumière ; et Van Gogh qui en a fait « sa » couleur, qu’il dit être la « clarté suprême de l’amour ». Ce jaune qui va envahir tous ses tableaux, « un jaune qui hurle » …
Je n’oublierai pas que du jaune (mélangé avec un peu de bleu, je l’admets) naît le vert (« ma » couleur) et qu’il est absolument associé à des émotions positives dans le symbolisme des couleurs, synonyme de chaleur humaine et de lien entre les hommes…comme un beau week-end d’Ascension ensoleillé…Vous boirez bien un petit « jaune » ?
Anne-Marie Chust
Lire Jaune de Michel Pastoureau (Seuil, octobre 2019, 240 pages)
