Le vert est étrange

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Couleur ambivalente, sinon ambigüe, symbole de vie, de sève, de chance et d’espérance d’un côté et de l’autre associée au poison car sa teinture était corrosive et instable¹, liée au malheur, au Diable, à ses créatures et au Destin, j’aime la couleur verte sous toutes ses formes et ses nuances.

Pour Rimbaud, dans son célèbre poème Voyelles, le vert représentait le « U »², le vert associé au front de l’intellectuel (il est gage de concentration dans les bibliothèques), de la sensibilité, de l’intuition, de la parole raffinée cherchant la perfection avec ce U, qui est comme un récipient laissant une grande ouverture vers le ciel (la pensée, l’intuition). Une occasion de s’ouvrir à un monde un peu plus spirituel. Car le vert est étrange, la couleur du hasard, du destin, il représente ce qui change, ce qui n’est pas stable, les tapis verts des tables de jeux des casinos, les martiens, la souris verte qui courait dans l’herbe… mais c’est aussi un porteur d’espérance, de cycles de la nature, de renouveau à venir, il passe du vert gazon au vert citron, vert pâle, vert printemps, vert moyen mais aussi, vert jaune comme l’automne, vert lande immuable, vert mer foncé comme en hiver, vert sapin pour noël…

De l’époque romantique à aujourd’hui, il est définitivement devenu la couleur de la nature (les produits bio), celle de la santé et de l’hygiène (les croix des pharmacies), et de l’écologie (il a donné son nom à un parti). On pense même qu’il pourrait sauver la planète. Bizarre pour une couleur empoisonnante qu’elle soit devenue maintenant synonyme de santé et de vertu. Ne soyez pas « vert(e)s » de ce que je vous raconte, après avoir affronté des vertes et des pas mûres… mettez-vous plutôt au vert (comme moi)… vous avez notre feu vert !

Anne-Marie Chust

¹En Grèce Antique, les comédiens qui portait à vie la même tenue verte finissaient par en mourir.
²« U : Cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides
Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux. »
LIRE Vert : Histoire d’une couleur de Michel Pastoureau (Éditions Seuil, Beaux-Livres)

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