Que connaissons-nous de nos ancêtres femmes ? Peu ou rien du tout. Et pourtant, elles ne se sont jamais tues mais ont souvent vécu dans l’ombre des hommes, ce qui explique leur invisibilité. Elles ont agi, travaillé, créé, combattu, écrit et milité mais l’histoire n’en a pas toujours conservé la trace. Titiou Lecoq a voulu leur redonner la notoriété qu’elles méritent.
De la préhistoire à avant-hier
Heureusement qu’elles sont descendues de leur arbre pour se mettre à quatre pattes, sinon nous ne serions pas là ! Chasseurs-cueilleurs, une qualité que l’on peut aussi attribuer aux femmes. Sur des squelettes, on voit la marque de l’arc pour le lancer des hommes, mais les femmes chassaient aussi, le petit gibier de préférence. Elles étaient féminines avec des coiffes de coquillages, des colliers de canines de cerfs percées et de la poudre de fer et de l’ocre rouge sur le corps. Ce qui ne les empêchaient pas de parcourir quelques vingt kilomètres par jour pour la cueillette et rentrer en portant une quinzaine de kilos de nourriture végétale. Elles représentent la majorité des figures humaines présentes sur les parois des grottes de Lascaux ou Chauvet, une fascination qui s’expliquerait parce que les hommes n’avaient pas percé le mystère de la femme qui enfante un être mâle.
Comment devenir une femme
Si les garçons suivent un rite d’initiation pour devenir des hommes, les filles avant la puberté, chez les nobles, devenaient des ourses sauvages « Arkteia », avec le sacrifice d’une chèvre, elles fêtaient cette transformation en courant nues sous une fourrure d’ours. Les armes trouvées dans les tombes, symboles du sexe masculin, mais celles des Amazones, des femmes guerrières, ne peuvent être ignorées. Grâce aux analyses ADN, près de 37% des tombes ont montré qu’elles étaient armées d’épées de bronze et de poignards en fer. De Brunehaut à Jeanne d’Arc, des enlumineuresses de parchemins aux bâtisseuses de cathédrale, des trobairiz, les troubadours-femmes, aux ménestrelles avec 13% de femmes chez les musiciens, elles étaient partout au Moyen-Âge et la Renaissance les a même mises au pouvoir comme Catherine de Médicis ou Diane de Poitiers.
Des hommes ratés
La Révolution a permis aux femmes de demander l’abolition des privilèges masculins quelles n’obtiendront pas mais pourront enfin hériter et divorcer. On est passé du patriarchisme au conjugalisme. Autrefois, le symbole du pouvoir était représenté par un homme, le Roi, la République le sera par une femme, Marianne, parce qu’elles n’ont pas de pouvoir ! Au 19ème siècle, on séparait les métiers d’homme et les métiers de femmes et on les payait moins parce qu’elles étaient censées avoir un mari qui travaille. Cette habitude perdure et l’égalité des salaires est un combat encore inabouti. Le droit de vote pour les femmes a existé en France après l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne ou la Turquie et l’oubli gagne les manuels scolaires des collèges et lycées sur la place des femmes dans l’Histoire enseignée.Pour ne plus jamais dire « je ne savais pas » mais « maintenant je sais ». Et pour aller dans le sens de Madame de Sévigné qui répondait à un homme qui se plaignait « Je suis malade » elle rétorquait « Je la suis également » car si elle avait répondu au masculin, elle aurait eu l’impression de porter la barbe !
Une vraie découverte à la lecture de cette histoire drôle, mais bien documentée, que nous offre Titiou Lecoq, argumentée par les avancées des chercheurs et anthropologues du monde entier et préfacée par la grande historienne Michelle Perrot.
Vicky Sommet
« Les grandes oubliées. Pourquoi l’histoire a effacé les femmes » de Titiou Lecoq aux éditions l’Iconoclaste (septembre 2021).
« Mozart était une femme – Histoire de la musique classique au féminin » d’Aliette de Laleu aux éditions Stock (février 2022). Le destin contrarié de Nannerl, la sœur ainée de Mozart, brillante claveciniste parce qu’elle n’avait pas été autorisée à jouer du violon, l’instrument dont elle rêvait. Elle accompagnait son frère dans toutes ses tournées à travers l’Europe.