Reines, femmes et mères

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La monarchie est le seul domaine où la continuité s’effectue de manière sexuée. La reine est souveraine ou femme de souverain mais aussi mère, future grand-mère et surtout, une personne en chair et en os car son corps joue un rôle capital dans la transmission du pouvoir.

Le rôle des reines

« Une reine ne se réduit pas à un organe reproducteur ou à une anatomie assujettie au devoir conjugal et à la vie de la cour ». Cette assertion de l’historien Stanis Perez pourrait montrer l’inaptitude des femmes pour gouverner. La survie d’une dynastie dépendait de la loi salique qui imposait de concevoir un maximum d’enfants pour espérer un héritier mâle le jour de la mort du roi. Déjà, en moyen français, on écrivait non pas reine mais « roïne », le féminin de roi. Au Moyen-Âge, tous les princes ne sont pas charmants mais toutes les reines sont belles comme Blanche de Castille « Tres bone et tres bele, et tres franche pucelle, et sage durement, Blanche par nom ».

La nécessité d’enfanter

La reine à la Renaissance devait concevoir des enfants, à défaut d’en avoir, elle devait s’efforcer d’aimer ceux de son époux. Sous Catherine de Médicis, ne disait-on pas que la reine idéale était « Mère et nourrice de toute paix et tranquillité » ! La maternité pouvait servir d’instrument politique et les grossesses et les accouchements des évènements dangereux, voire mortels. Ainsi pour Anne de Bretagne qui peinait à se relever de la naissance d’un enfant mort-né, les poètes écrivaient :

Feminin sexe, aussi doux que rosee,
Helas, par vous soit la face arrosee
De mainte larme, en amour embrasee,
Pour vous letter du peril ou vous estes
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Les femmes au pouvoir

Les femmes exerçaient le pouvoir tant que les hommes y consentaient. La gynécocratie avait besoin de certitude : une reine guerrière serait accusée de renier sa nature au profit d’une virilité jugée déviante. Alors étaient-elles seulement un ventre pour un royaume ? Non car le peuple louait leur beauté et les poètes s’en donnaient à cœur joie : « Ta femme sera comme la vigne abondante à l’entour de ta maison, Et tes enfants comme nouvelles plantes d’olivier à l’entour de ta table. » Marie-Antoinette enceinte n’a plus été sous le feu des critiques mais son calendrier des menstrues était diffusé publiquement. Un corps devenu marchandise car on avait laissé entrer une foule compacte pour assister à son accouchement et la reine faillit en mourir.

Napoléon ramenait le corps de Marie-Louise à une femme du peuple « Oubliez qu’elle est impératrice et traitez-la comme vous traiteriez la femme d’un petit marchand de Saint-Denis », elle qui la première subit l’épreuve des forceps sans anesthésie locale. Or, dès la naissance, le corps fécond est mis au second plan. Seul compte l’enfant qui vient de naître ! Au fil de l’histoire, on voit finalement qu’en France, « Le vagin n’a jamais pris le pouvoir »…

Vicky Sommet

©Le corps de la Reine - Stanis Perez« Le corps de la reine » de Stanis Perez aux éditions Perrin (août 2019).

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