Un village à mon image : Quelmer              

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Calme et discret, vivant et chargé d’histoires, c’est le village de Quelmer. Prononcer Quelmé sans le R, mais l’air est bien là, air iodé, air chargé d’embruns, un air respiré par ses 656 âmes, un village sans église sur la place, sans commerces ni boucherie Sanzot comme chez Tintin. 

Un décor de pierres

Comme dans toute cette région de Bretagne, nous sommes dans un univers de granite que ce soit sur les remparts, les chaussées pavées et sur les façades des maisons. Il représente 40 % du massif armoricain et marque de son empreinte la région à tel point que les agriculteurs doivent souvent contourner les obstacles pour labourer leurs champs. Dans les Côtes-d’Armor, le granite donne même l’impression de « pousser » au milieu des prairies ! Certaines ont gardé leur toit de chaume comme cette demeure anciennement maison des impôts, toutes faisant partie de « l’enclos », qui regroupait les dépendances des châteaux.

La mer au pied du village

Ou plutôt le bras de mer, l’anse de Quelmer, qui abrite un cimetière de bateaux. Une quinzaine d’épaves abandonnées, témoins de l’histoire maritime locale qui nous immergent dans un passé révolu. Les marins ne souhaitaient-il pas s’en séparer et ont-ils préféré les laisser mourir de mort naturelle ? Des artistes ont envahi l’endroit et décidé de décorer ces bâtiments rongés par la mer en peignant leurs coques de bois, des œuvres qu’on découvre au hasard des marées. Un sentier de randonnée de 7km5 serpente le long de l’anse pour admirer ces tableaux mouvants de cotres, chalutiers et autres caboteurs éventrés.

La Passagère

Ce n’est pas une femme mystérieuse mais un lieu-dit qui fut le théâtre d’un fait divers à la fin du 18ème siècle. Le passage d’une rive à l’autre se faisait par barque, une traversée empruntée par les visiteurs, promeneurs et contrebandiers. Le passeur qui habitait là manquait à l’appel un matin et on découvrit son corps, ceux de son épouse et de ses six filles, égorgés, des meurtres jamais élucidés. Depuis, la petite plage porte le nom de « l’Anse de l’Égorgerie ». Autre témoin de l’histoire, le château du Bos, une Malouinière (la malouinière est une vaste demeure de plaisance construite par des négociants et armateurs de Saint-Malo aux XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles) édifiée par les Magon, grands navigateurs et importants négociants de la région. Le granite fut importé de Chausey, le marbre d’Italie pour les cheminées et les statues des 4 saisons. Des salles lambrissées de chêne, un jardin à la française, un parc de 10 hectares et une chapelle rappellent ce passé glorieux.

C’est une certaine nostalgie qui se dégage de ce village que je ne vous situerai pas sur une carte pour qu’il reste dans son jus, calme la journée, silencieux le soir, pour que les bateaux échoués meurent d’un dernier coup de grâce que leur assènera la marée montante et pour qu’à la nuit tombée, les craquements des carcasses et les fantômes des marins puissent prendre possession des lieux sans être dérangés.

Vicky Sommet
©Château du Bos

Visites possibles du Château du Bos en août et septembre.

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