Flavie Servant, une vie au service des autres

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À l’heure où gentillesse et bienveillance ne sont pas des qualités prioritaires, rencontrer Flavie Servant a donné lieu à un bel échange. Éprouver depuis l’âge de dix ans l’envie de devenir infirmière parce qu’ « elle aime les autres » et surmonter tous les obstacles qui barraient sa route m’ont paru être le reflet de la forte personnalité de celle qui a suivi son chemin pendant cinquante ans sans jamais se départir de son empathie envers les malades.

Bonté et gentillesse, des qualités innées

Comme toutes les petites filles, Flavie aimait jouer à la poupée, pas pour les materner, mais pour les soigner : « J’ai toujours eu envie d’aider, d’être gentille avec les autres ». Peut-être une compensation pour une maman qui a quitté la maison, un père absent, plus le fait de ne pas avoir connu ses grands-parents qui l’attirait instinctivement vers les personnes âgées. Une enfance passée dans un village au Maroc, un hôpital où seuls les hommes étaient infirmiers et l’école obligatoire pour les filles. De retour en France, elle doit s’occuper de ses frères et sœurs, se fâche avec son père. Seule solution, la pension et c’est en faisant appel au juge des enfants qu’elle parvient à concrétiser son souhait de continuer l’école pour vivre sa vie d’enfant désireuse d’apprendre.

« M’occuper d’enfants, de malades et devenir infirmière, une vocation contredite par mon père militaire qui a voulu m’en empêcher. Les infirmières, disait-il, des filles à soldats ! Autant aller dans un bordel ! »

Un regard lucide sur le monde de l’hôpital

Flavie Servant¹, une fois ses études terminées, a voulu oublier son passé douloureux. Elle trouve un poste d’infirmière à l’hôpital de Gonesse en tant que stagiaire : « Quand on quitte ses études d’infirmière et qu’on exerce le métier dans une structure, on se retrouve dans un monde très différent car, dans un service d’hôpital, on fait tous les jours les mêmes gestes, les mêmes soins. Alors, tous les ans, lassée par la routine, je changeais : le bloc opératoire, la chirurgie, la médecine, les urgences, les consultations, comme si j’avais envie de continuer à être stagiaire et apprendre encore. Nous avions appris à encourager les malades, à les accompagner dans leur détresse, à les rassurer car avant on avait le temps. Aujourd’hui, c’est l’usine, on ne se salue pas, on regarde le dossier, pas le patient ! »

Infirmière à domicile

Le travail à l’hôpital est très technique et l’urgence pèse, alors qu’à domicile il faut prendre son temps, surtout quand les personnes sont en fin de vie : « On se met à la fois en retrait car on pénètre dans l’intimité du malade et en avant quand on remplace un membre de la famille absent ou incompétent. Parmi mes souvenirs, un Académicien que je soignais s’est retrouvé en sang dans sa baignoire. J’ai dû vite soigner sa plaie à la tête car il devait participer à une émission de télévision et il a mis sur mon conseil un chapeau pour que rien n’apparaisse. »

« J’ai eu la chance d’être en bonne santé, jamais malade, toujours optimiste, équilibrée et pu ainsi prendre les problèmes des autres à bras-le-corps, souvent aux dépens de ma propre famille ! »

Humaine, attentive, respectueuse, tous les qualificatifs qui montrent une attention à l’autre peuvent définir Flavie Servant, l’infirmière qui a toujours accouru dès qu’on l’appelait, sans regarder ses horaires, ses priorités ou ses obligations familiales. Pas de vacances, une maman qu’elle accompagne en fin de vie, un père qu’elle reverra le jour de sa mort et un livre pour conter toutes les rencontres où elle a su se montrer indispensable. Plus qu’un livre de souvenirs, un livre de vie !

Vicky Sommet

¹« Besoin d’une infirmière de toute urgence » de Flavie Servant (Éditions L’Harmattan, mars 2014, €25)

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